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avaient arboré leur bluet et s’étaient armés de leurs fusils, transportés par les soins de Moschin du stand à la direction.

Le chef policier leur avait, en outre, fait distribuer des cartouches, six par homme, ce qui porta leur enthousiasme à son comble.

Dans leur exultation, Moschin eut même quelque mal à les empêcher de décharger leurs fusils sur d’inoffensifs passants. Histoire de se faire la main !

Ils étaient convaincus que les mineurs, intimidés par leur allure belliqueuse, n’oseraient s’approcher si jamais ils avaient eu envie de se livrer à quelque manifestation contre la Compagnie.

Moschin ne croyait pas à une attaque ou même à une démonstration des mineurs. Il ne doutait pas que Michet eût réussi à dissoudre la réunion du Fier Lapin, et à disperser les syndiqués. Toutefois, il était de bon principe de parer à toute éventualité ; d’ailleurs, ce qui ne se présentait pas le jour même pourrait se présenter le lendemain. En faisant prendre les armes aux sociétaires de la Vieille Patrie française, il préparait ces jeunes gens à un conflit qui pourrait venir plus tard, et, en même temps, il intimidait les ouvriers.

La veille, il avait pris l’apéritif avec le commissaire de police, et, celui-ci s’étant enquis si l’aide de ses agents était nécessaire, Moschin avait répondu :

— Oh ! pas le moins du monde. Gardez-les seulement sous la main au cas où il se produirait quelque effervescence dans la ville. Je vous signalerai demain les syndiqués qui auront fait les mauvaises têtes, et il vous sera facile de les faire arrêter à domicile.

— Vous êtes bien aimable, monsieur Moschin… À la vôtre ! avait répondu l’impartial fonctionnaire en choquant son verre contre celui de son interlocuteur.

Le brigadier de gendarmerie, prévenu également que toutes mesures étaient prises, continua une pas-