Page:Malato - La Grande Grève.djvu/386

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ment, n’avait pas encore osé engager la lutte : il ne se sentait point assez fort pour cela. Tout au plus, les membres de la commission s’étaient-ils bornés à des démarches : démarches vaines ! Toujours éconduits, ils s’en revenaient, frémissants d’une colère contenue, tandis que Moschin, froidement correct, riait sous cape de leur impuissance.

Le syndicat s’efforçait d’aider les malheureux congédiés, par des collectes et des recommandations auprès des groupements ouvriers des autres villes ; mais c’était tout ce qu’il pouvait faire.

Cette fois, le renvoi était bien autrement grave, et par le nombre de mineurs frappés et parce que tous, sans exception, appartenaient au syndicat.

Le but de la Compagnie apparaissait clair, évident ; elle voulait tuer le groupement ouvrier.

Et c’est pourquoi, alors que les réunions corporatives rassemblaient au plus d’ordinaire une quarantaine d’hommes, près de trois cents se groupaient, cette fois, dans la salle et la cour du Fier Lapin.

Les fenêtres et la porte de la salle donnant sur la cour avaient été ouvertes toutes grandes, de façon que tous pouvaient voir et entendre Ouvard, installé à la tribune.

— Camarades, clama le secrétaire du syndicat, d’une voix qui domina le bruit bourdonnant des conversations et des colloques, du silence, je vous en prie ! La situation pour nous tous est des plus graves : il s’agit de nos intérêts vitaux, de la vie ou de la mort de notre famille ouvrière, de l’indépendance morale ou de l’esclavage de tous ses membres.

— Vive le syndicat ! cria une voix, et ce cri, répété par tous les assistants, éclata comme un tonnerre, faisant trembler l’établissement.

— Fichtre ! pensa Marbé, assis à son comptoir. Voici les mineurs qui s’échauffent : pourvu que ça ne se gâte pas !

— Camarades, continua Ouvard, il ne suffit pas de