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maison à un étage, avec cour intérieure, en plein centre de la ville, avait sous-loué presque pour rien, une grande pièce au syndicat.

Néanmoins, cette fois-là, l’immeuble de Brossel n’eût pas été assez grand pour contenir tous les mineurs du syndicat accourus à l’appel de la commission. Aussi, celle-ci s’était-elle entendue avec Marbé qui, alléché par la perspective d’une énorme consommation de verres petits et grands, avait fini par prêter sa salle avec la cour adjacente.

Le syndicat des mineurs comptait cinq cent quarante-six adhérents, et seule la crainte de se compromettre empêchait des centaines de mineurs d’en faire partie. Ce travail de recrutement s’était effectué peu à peu, de façon continue, et maintenant la compagnie, se trouvant en présence d’un groupement compact, ne pouvait le briser d’un coup. Remplacer du jour au lendemain plus de cinq cents paires de bras était chose ardue, sans compter le trouble que ce renvoi en masse d’hommes répartis dans divers services causerait dans l’exploitation.

Jusqu’à ce jour, le syndicat s’était tenu strictement sur le terrain le plus légal. Moschin, renseigné par Canul, et quelques autres misérables, de même trempe, demeurait au courant des délibérations, mais l’ancien révolutionnaire était un homme judicieux, se défiant du feu qui peut couver sous la cendre et il se disait que ce syndicat, si modérées que fussent ses allures, pouvait, sous l’influence des événements, devenir un redoutable centre d’action.

Dans l’impossibilité de renvoyer en bloc tous les syndiqués, il s’efforçait de les renvoyer en détail, adoptant le système des petits paquets. Il faisait, sous le moindre prétexte, congédier deux ou trois mineurs, et, dans le nombre, il y en avait toujours au moins un appartenant au syndicat.

Celui-ci, ainsi menacé par cette élimination lente et continue, qui tendait à paralyser son développe-