Page:Malato - La Grande Grève.djvu/362

Cette page a été validée par deux contributeurs.

et, aussitôt arrivée dans cette ville, se rendait à l’évêché.

Elle avait ses grandes entrées à l’évêché où trônait, tout-puissant, inspirateur occulte du prélat, un jésuite sexagénaire, le père Carino, l’ancien confesseur de des Gourdes, celui-là même qui avait fait le mariage du baron.

Monseigneur, magnifique et solennel, commandait le troupeau des prêtres de son diocèse ; le père Carino, actif et modeste, dirigeait Monseigneur.

L’un et l’autre avaient la plus grande considération pour Mme des Gourdes, prisant surtout son intelligence nette et aiguë que jamais ne troublait la fièvre des sens.

Mme des Gourdes fléchit le genou devant Monseigneur qui, tout aussitôt, la releva d’un geste rapide, indéfinissable, où se fondaient la bénédiction épiscopale et la salutation de l’homme du monde. Puis, comme la visiteuse saisissait pour baiser l’anneau pastoral la main tendue vers elle, cette main, avant même d’arriver à ses lèvres, lui serra cordialement les doigts, tempérant par le « shake-hand » égalitaire cet hommage rendu non à l’homme, mais au prêtre.

Cette réception indiquait en quelle haute estime était tenue à l’évêché Mme des Gourdes. Celle-ci, tout en s’astreignant aux formules de vénération qui consacrent la soumission des fidèles au pouvoir spirituel, émané de Dieu, était considérée par le prélat comme une collaboratrice.

Le père Carino eut ensuite sa part : un salut de tête, un sourire et une poignée de main.

Ce fut lui qui, sur un signe de Monseigneur, poussa un fauteuil en face de la chaise à bras sculptés et à dais, véritable trône, où siégeait l’évêque.

— Eh bien, madame, nous apportez-vous de bonnes nouvelles de Mersey ? demanda le prélat une fois les premiers compliments échangés.