Page:Malato - La Grande Grève.djvu/312

Cette page a été validée par deux contributeurs.

mission policière, mais si elle eut un soupçon, quoique bavarde, elle le garda pour elle. D’ailleurs, les tenanciers d’hôtellerie ont, en général, le respect de l’autorité, même lorsqu’elle se manifeste sous sa forme la plus répugnante.

Martine avait passé la plus grande partie de la nuit à se promener autour de l’Étoile solitaire.

Il se disait que si l’individu qui s’était arrêté au cabaret de Véran était réellement Détras, il ne manquerait pas, après s’être engagé sur la route de Chôlon pour dépister toute poursuite, de se rabattre sur celle de Gênac. Sans doute, choisirait-il la nuit pour se présenter à l’Étoile solitaire.

Son gourdin à la main, son revolver chargé dans la poche, Martine s’était ainsi tenu en embuscade de dix heures du soir à trois heures du matin, inspectant la route et les halliers qui la bordaient, guettant l’apparition d’une lumière à une des fenêtres de l’auberge. Mais rien : harassé, il avait fini par aller se coucher.

Certes, il eût pu prévenir la police du Brisot et se décharger sur elle du plus ardu de la tâche. Mais alors tout l’honneur et le profit lui eussent été enlevés. Et puis, il n’était nullement sûr que l’individu fût Albert Détras. Pour ces diverses raisons, il lui convenait d’opérer seul.

Il ne s’était éveillé qu’un peu avant dix heures du matin et avait eu cette exclamation en regardant la pendule :

— Sapristi ! Je me rouille.

Rapidement, il s’était habillé et avait, sans tarder, pris la direction de l’Étoile solitaire.

Rien d’anormal n’y apparaissait : Panuel travaillait à son établi, Geneviève cousait, assise au comptoir.

Martine vit tout cela d’un coup d’œil et continua son chemin. Puis, à cent pas plus loin il tourna court à travers des taillis et alla s’asseoir dans un fourré d’où il pouvait surveiller l’auberge.