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L’épître était ainsi conçue :

« Monsieur le maire,

« Sachant quel intérêt vous avez bien voulu porter au nommé Galfe (Charles-Louis), condamné par la cour d’assises de Chôlon, pour les événements de Mersey, et quelles démarches vous avez, depuis longtemps, faites en sa faveur, j’ai le plaisir de vous annoncer que la grâce de cet individu vient d’être signée ce matin même par le chef de l’État. Le décret paraîtra vraisemblablement demain même au Journal officiel.

« L’autorité préfectorale espère que les personnes généreuses qui se sont intéressées au sort de ce malheureux égaré veilleront à ce que son retour ne soit pas exploité par des éléments de désordre.

« Recevez, monsieur le maire, l’assurance de mes sentiments distingués.

« Le préfet de Seine-et-Loir,
« Blanchon. »

Paryn demeura songeur. Il y avait dix ans que Galfe, frappé par la vindicte bourgeoise, peinait dans l’enfer du bagne ayant perdu jeunesse, amour, tout ce qui rattache l’être à la vie.

Maintenant que tout ressort devait être brisé en lui, qu’il n’était plus, vraisemblablement, qu’un cadavre vivant, on le rendait à la liberté !

Que serait pour lui cette liberté ? Retrouverait-il jamais la compagne qui l’aimait si tendrement ? Pourrait-il se refaire une vie ?

Qu’était devenue Céleste Narin ? Paryn, qui avait dans les réunions publiques — son début oratoire — défendu le mineur et assisté à son jugement, se rappelait la jeune fille : une belle enfant qui ne semblait vivre que pour son amant.

Que pouvait peser le supplice de cette petite âme dans la marche majestueusement inexorable de la