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— Le tout pour le tout ! s’écria-t-il.

Et, avec une force de traction décuplée, il se hissa. Si la liane ou le boyau se rompait, si le filet se détachait des buissons, il était perdu : il allait s’abîmer, fracassé, au fond du précipice.

Mais les mailles du filet étaient solides ; en outre, l’extrémité inférieure en était, selon l’habitude canaque, garnie de petites pierres servant à assurer son immersion, car les filets des indigènes néo-calédoniens ne forment pas poche. Tressés tout d’une pièce, ils servent à barrer la largeur des cours d’eau et à arrêter la fuite du poisson, qu’on capture à la main ou à la sagaïe, beaucoup plus qu’à envelopper en tous sens ce poisson.

Le filet, auquel ses pierres avaient, dans sa rotation, communiqué une force centrifuge suffisante, s’était agrippé et emmêlé solidement aux branches des buissons. Très heureusement, ces branches étaient robustes.

Un instant après, Détras, s’élevant jusqu’au rebord du gouffre, arrivait aux buissons, s’y accrochait et tombait enfin sur le lit de verdure épuisé, inanimé, mais sauvé.

Sauvé ! Pas encore : il lui restait une centaine de mètres à gravir avant d’arriver au sommet de la montagne et maintenant ses muscles surmenés lui refusaient tout service.

Détras se reposa pendant plusieurs heures avant de reprendre son ascension.

Il goûtait un soulagement immense à s’étendre sur cette mince couche de végétation qui bordait la ravine traîtresse dans laquelle il avait failli rester. Il ne pouvait s’empêcher de frémir en mesurant du regard l’abîme au fond duquel se trouvait, peu visible maintenant, la petite vallée.

Avant le coucher du soleil, il atteignit le sommet de la montagne.

Et alors quelle vue s’offrit à ses regards !