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dépouillé et vidé, mettant de côté les boyaux pour les faire sécher et s’en servir comme de cordes : il se disait qu’il pourrait avec ces cordes et les os aiguisés par le frottement contre les roches, se fabriquer un arc et des flèches.

Détras avait mordu en affamé dans cette chair saignante et l’avait trouvée exquise.

Rassasié, il se mit à dépouiller les deux autres bêtes. Le travail, cette fois, fut beaucoup plus pénible, vu l’insuffisance de son instrument et dura la moitié de la nuit.

Enfin, il eut devant lui un amas de viande qu’eût envié un carnassier.

Son désir eût été de pouvoir découper cette viande en tranches extrêmement minces et de les faire sécher au soleil, dont l’action peut remplacer celle de la fumée.

Oui, mais pour cela, il lui eût fallu au moins un couteau. Avec l’aide combinée de ses doigts, ses dents et la bouche, il ne pouvait tailler et découper que de façon très insuffisante.

Une idée soudaine lui vint : il se rappelait avoir lu dans la bibliothèque de son père que les cavaliers tartares préparaient la viande crue, tout simplement en la comprimant sous leur selle. En battant cette chair canine à coups répétés, il finirait par l’attendrir, l’amincir et la rendre plus propre à subir l’action des rayons solaires.

Détras se déchaussa, gratta et lava très soigneusement avec l’eau de la grotte la semelle et le talon de ses godillots, que la marche avait recouverts d’une couche de terre dure. Puis, étalant la viande à plat sur la roche, il la frappa à coups redoublés de ses souliers comme d’un marteau.

Au bout de plusieurs heures de cet exercice fatigant, une grande partie de la viande était aplatie comme sous le hachoir du boucher.

Déjà le jour se levait. Détras tendit en guise de