rencontrer un, il n’eût pas su la gouverner, il s’éloigna de la mer, quitte à y revenir. Il comprenait d’instinct qu’une battue eût pu l’acculer dans ces marécages et amener sa capture s’il ne se décidait à chercher le large, c’est-à-dire l’asile des montagnes.
Détras franchit donc la grande route de Nouméa au Diahot, à plusieurs kilomètres au nord-est de Bouloupari, marchant le plus possible à couvert et explorant du regard le terrain devant lui. Il avait emporté à la fois le revolver et le gourdin de Carmellini, et était bien décidé à ne pas se laisser prendre sans une résistance désespérée. En outre, bonheur inespéré, le gilet du garde-chiourme contenait une montre et cinquante francs.
L’ancien mineur était l’honnêteté même. Toutefois, on se tromperait singulièrement en s’imaginant qu’il eut une seconde l’idée d’aller retrouver son bourreau pour lui restituer cette propriété. Cet argent avec les vêtements, c’était, dans son épouvantable situation, le salut possible.
Tant par les récits de forçats qui étaient allés en détachement sur divers points de la brousse que par la vue quotidienne d’une grande carte appendue au mur de la case du surveillant militaire, Détras avait une idée, au moins générale, de la région dans laquelle il se trouvait. Il résolut de gagner les contreforts du mont Ouitchambô.
Lors de la célèbre insurrection canaque de 1878, des combats acharnés s’étaient livrés dans ces parages. Les tribus révoltées, après avoir massacré habitants et fonctionnaires de Bouloupari, avaient tenu dans les montagnes où les soldats d’infanterie de marine ne purent en avoir raison qu’avec l’aide d’auxiliaires indigènes servant de rabatteurs. Maintenant, ces vastes régions étaient inhabitées, sauf peut-être par quelques évadés errant dans la brousse.
Cette absence de tribus était un atout dans le jeu de Détras, car les Canaques, excellents coureurs, sti-