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Paryn, c’était la faction intermédiaire entre cette bourgeoisie démocratique, libérale en politique, conservatrice en économie, et le prolétariat révolutionnaire dont l’heure s’approche. C’était le parti destiné aux affaires dans une période préparatoire d’évolution à gauche.

À Climy, la lutte avait été chaude. Plus d’une fois les paisibles habitants avaient failli s’entre-dévorer, grâce surtout aux incitations de la Gazette de Seine-et-Loir qui jetait flamme et venin sur le candidat radical-socialiste. Le cabaret du Poisson-bleu, transformé en place forte des partisans de Balloche, avait vu des batailles homériques. Le soir de la proclamation du scrutin, il avait été pris d’assaut par les rouges, Poulet en tête, au cri de : « Vive Paryn ! »

La nouvelle de cette élection avait naturellement indigné des Gourdes et sa femme, celle-ci plus encore. Si le nouveau maire de Climy n’eût été qu’un arriviste, radical par besoin d’étiquette, elle ne se fût pas émue outre mesure : ces sortes d’individus, qui commencent en révolutionnaires pour finir en conservateurs, calculant vingt ans à l’avance les phases de leur évolution rétrograde, ne lui inspiraient pas la moindre crainte. Mais Paryn n’était pas du tout de cette trempe : il s’était attaqué à l’omnipotente direction des mines de Pranzy, encore que cette région ne fût pas appelée à lui fournir des électeurs, puisque sa commune et sa circonscription étaient essentiellement agricoles, preuve qu’il n’était point guidé par l’idée fixe d’un mandat à conquérir. Un tel homme était dangereux.

— Les articles de la Gazette ont fait long feu, dit la baronne à son mari.

— Long feu ! Il en restera toujours quelque chose, répondit des Gourdes qui avait lu Beaumarchais.

— C’est égal, il faut trouver mieux. D’autant plus qu’il va avoir son journal.

— On le dit.