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fille de transportés, elle saurait ce qu’est la vie, ce qu’elle pourrait et devrait être : elle serait digne de porter le nom plébéien des Détras.


VIII

AGITATION ÉLECTORALE


Il y avait ce jour-là à Climy une grande effervescence.

La foire aux bestiaux s’était terminée trois jours auparavant et, bien que quelques vendeurs heureux, au gousset bien garni, traînassent encore dans les cabarets, il était impossible d’attribuer cette effervescence aux transactions effectuées sur les représentants des espèces ovine, bovine et porcine.

Non. Des débits emplis par la clientèle dominicale s’élevaient des éclats de voix disputeuses, aigres ou colères, lançant ces lambeaux de phrase :

— Lui ! il en aura plus que vous ne croyez… Tout Climy.

— Vous êtes un imbécile ! Tout le monde sait bien…

— Je vous dis qu’il en aura plus de douze cents.

— Huit cent cinquante…

— Crétin ! Ivrogne !…

— Vendu !

À ces aménités, on pouvait comprendre tout de suite qu’on se trouvait en période électorale. Les épithètes malsonnantes étaient échangées par des personnes qui ne se trouvaient pas du même avis ; les chiffres se rapportaient non aux prix de bestiaux à vendre, mais au nombre d’électeurs qu’on supputait en faveur des candidats.

Climy était et est encore une excellente petite ville, parée de verdure et de fraîcheur. Les toits rouges de ses maisons émergeant de l’épaisseur des massifs