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sel, établi à Wagap, passait pour posséder au plus haut degré l’éloquence du crû. Digne continuateur de Pierre l’Ermite, il se servait de son ascendant, pour entraîner ses ouailles à la guerre contre les infidèles. Ils se sont d’abord appliqués à capter les chefs avec des cadeaux, des tours de physique et de la médecine usuelle : une fois maîtres des potentats, ils ont eu les sujets.

À côté des maristes, des frères soit ouvriers soit enseignants, s’occupent des travaux matériels des missions et de l’éducation selon le Syllabus. Détail caractéristique, les Pères sont presque tous gras et fleuris, les frères ouvriers maigres et secs : cela doit tenir à la différence des occupations. « Nous avons fait vœu de nous consacrer à jamais à la conversion des âmes, déclarent béatement les missionnaires, nous ne devons plus revoir notre patrie. » Parbleu ! la plupart ont commis des frasques qui rendaient leur séjour en Europe impossible et, comme l’Église catholique a horreur du scandale, on les a expédiés sans bruit aux antipodes ! Nous aurons l’occasion de reparler d’eux à plusieurs reprises.

Des sœurs de Saint-Joseph de Cluny travaillent plus spécialement les âmes féminines. Elles dirigent, à Nouméa, une maison d’orphelines, pauvres filles ignorantes de tout, que l’on marie au premier rastaquouère venu qui en veut ! Elles ont également, à Bourail, la surveillance du paddock, sobriquet sous lequel on désigne la maison qui reçoit les femmes condamnées provenant des centrales de France. Ces recluses transportées sur leur demande dans la colonie, pour y trouver épouseur, constituent, la plupart du temps, de singuliers ménages ;