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montrer son énergie et sa fierté, peut-être parce que ces dernières qualités s’étaient développées dans la lutte et pour la lutte, tandis que la bonté était l’expression spontanée de sa nature intime.




J’eus l’honneur et le bonheur d’être lié à Kropotkine pendant de longues années par la plus fraternelle amitié. Nous nous aimions parce que nous étions animés par la même passion, par la même espérance, et aussi par les mêmes illusions.

Tous deux de tempérament optimiste (je crois toutefois que l’optimisme de Kropotkine dépassait de beaucoup le mien et peut-être avait une source différente) nous voyions les choses en rose, hélas ! trop en rose — nous espérions, il y a déjà plus de 50 ans, dans une révolution prochaine qui aurait dû réaliser notre idéal. Pendant cette longue période, il y eut bien des moments de doute et de découragement. Je me rappelle, par exemple, qu’une fois Kropotkine me dit : « Mon cher Henri, je crains qu’il n’y ait que toi et moi pour croire en une révolution prochaine. » Mais c’étaient des moments passagers. Bientôt la confiance revenait, on s’expliquait de n’importe quelle façon les difficultés présentes et le scepticisme des camarades et on continuait à travailler et à espérer.