il laissait ensuite, compilateur sournois, couler ses propres commentaires. L’ancien sceptique, alors articulait un petit « U » sifflé, très aigu, voisin de l’ « I », chargé d’exprimer l’éblouissement.
L’événement dépassa le stade des rumeurs, devint un fait, dur, indiscutable et résistant. Ceux qui lisaient les mondanités dans les grands journaux parisiens virent le mariage dûment relaté, et le nom du Lieutenant de Vaisseau Comte de Préfailles cité comme témoin parmi d’autres noms.
Le Desgrès qu’avait épousé Mlle de Préfailles n’était pas « celui de l’énorme fortune », mais son frère cadet, d’un volume financier moindre, encore que fort au-dessus des plus grosses dimensions du Cantal et d’un autre ordre qu’elles. On sut qu’il était veuf, comme son frère d’ailleurs, et pas très jeune. C’était à lui qu’appartenaient ces Sablons que le pays prenait l’habitude d’adjoindre à son nom. Il avait, par caprice d’homme extrêmement riche, racheté les anciennes futaies, bois taillis, prairies, pâtures, terres de labour, fermes et métairies, reconstitué à peu près toute l’ancienne terre.
— Ainsi, dit quelqu’un, elle rentrera chez elle.
Augustin entendit ces choses comme Mme Méridier et lui pénétraient dans la charcuterie Duperrier, après la messe, un dimanche de la fin de juin. Déjà on prévoyait un après-midi plein de soleil, et tout l’énervement de l’été.
Il sentit passer dans son cœur, comme à certaines cérémonies du deuil officiel anglo-saxon, une minute de silence. Les vacances qui s’approchaient, Ronsard et la Renaissance, les saucissons pendus en montre et recouverts d’étain cédèrent le pas, attendirent. La minute passée, les saucissons se mobilisèrent les premiers ; les vacances suivirent. Tout redevint ordinaire, calmement horizontal.
L’après-midi, Augustin et son père sortirent comme d’habitude, seuls. Christine, les petits et leur maman restaient inséparables de la voiture d’enfants.
— Que veux-tu lire ? dit le père.
— Musset, papa.