Page:Malègue - Augustin ou le Maître est là, tome I.djvu/100

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


I

PHILOSOPHIE


Les deux grandes choses vinrent ensemble ou peu s’en fallut.

Augustin traversa le bourdonnement du baccalauréat et la grosse mention sensationnelle, comme un prolongement des distributions de prix, pour lesquelles il imitait docilement l’horreur paternelle. Mais il apprécia le petit voyage. La ville de Faculté était territoire vinicole. Ils mangèrent des ragoûts noirs dans un restaurant de marchand de vins, plein de la forte odeur des gros crus du pays. Les amphithéâtres d’examens donnaient sur les jardins publics. Ce fut un voyage heureux.

Les deux prix au Concours général eurent plus de prestige. Augustin connut ce bonheur tout spécial, de l’espèce scolaire, fait entièrement avec de l’avenir, à la fois vide et débordant. M. Méridier, rajeuni, rafraîchi, ayant reconquis une partie de sa gaieté d’autrefois, se soumettait cet avenir.

Ses projets étaient d’envoyer Augustin faire sa philosophie dans un lycée de Paris. Ils furent déjoués. Le vieil éclectique prit sa retraite, décidément. Le Proviseur écrivit sur le professeur nouveau des éloges d’une modération capiteuse : « Nous avons le premier à l’agrégation. Grand hasard. Il nous restera juste un an. Augustin n’aurait pas mieux à Paris. La classe sera de sept élèves. Laissez-le-nous. »

Tout fut nouveau. Pour la première fois, dans l’octobre grave et chargé de fruits, les avenues illimitées de l’adolescence eurent une longueur de dix mois juste. Augustin quittait son père pour des terres inconnues qu’il laboure-