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DEUX AMIES

tait bien qu’elle se donnait le coup de grâce, qu’elle s’exécutait elle-même. Elle avait, durant des éclaircies calmes, la terreur sourde de l’avenir, l’effroi de mourir ou ce qui serait plus terrible que la mort, d’être claustrée dans un asile d’aliénés.

Pourtant elle ne renonçait pas à ses habitudes vicieuses. Elle n’essayait même pas de lutter, de se distraire, de changer le cours de ses pensées en s’épuisant par des exercices violents. Le mal était à son paroxysme, dégénérait en manie sénile et machinale.

Elle engagea à son service, comme femme de chambre, Mariette, l’un des modèles que Suzette et elle avaient plusieurs fois ramenés d’un café interlope de la place Pigalle. Mariette consentit à être ce qu’elle exigeait, reprit l’éducation entreprise par l’actrice.

Et Mlle de Tillenay s’enlisa dans la boue, courut avec cette fille les maisons de proxénètes, les tables d’hôte de femmes, fut bientôt connue de toutes les rouleuses, qui la tutoyaient, l’appelaient par son petit nom et l’emmenaient fumer des cigarettes et faire la