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LES PARISIENNES

carton avec des baisers prolongés de maman, s’était développée dans l’intimité dangereuse du voisinage.

Jeanne avait adoré tout de suite l’amie plus grande et moins gamine qu’elle qui l’amusait, qui, déjà dépravée par une femme de chambre de sa mère, répondait à ses pourquoi continuels et déflorait l’innocence de ce cœur encore empli de toute l’adorable bêtise de l’enfance.

Comme il était de mode pour une jeune fille d’avoir un brevet quelconque et le vernis superficiel de savoir qui permet de tout juger à tort et à travers, on les mit au même couvent. Là, se sentant plus seule, plus délaissée, cherchant une protectrice qui lui tendrait la main, qui la défendrait contre les caprices méchants des autres pensionnaires, elle appartint plus entièrement à Eva Moïnoff, elle se soumit à son autorité despotique.

Elles s’aimaient, et il eût été difficile d’analyser ce sentiment subtil où toutes les chatteries perverses de la jeune fille qui se sent devenir femme se mêlaient à un reste de puérilité bé-