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DEUX AMIES

cette vibration triste qui prolonge le tintement des cloches dans la brume ouatée des soirées d’hiver. Les lumières du couvent s’éteignaient une à une. Et l’odeur fade des cierges tout à l’heure soufflés dans la chapelle à la fin de la bénédiction, se répandait comme une buée pénétrante par les portes qu’ouvraient et refermaient du même geste lassé les sœurs de service.

Le silence grandissait, augmentant la sonorité des moindres bruits, le chuchotement monotone des voix, le cliquetis des grands rosaires dont les médailles se choquaient parmi les plis épais des robes de laine. Puis tout se tut. La sœur Marie-des-Anges fit un dernier tour le long des lits, et, satisfaite, tira derrière elle le rideau qui séparait seulement son alcôve du dortoir. Il y eut un froissement de linges empesés, le craquement des ressorts du sommier, un machinal marmottage de patenôtres et la paix solennelle de la nuit régna.

Le couvent dormait.

Cependant, la tête enfoncée dans l’oreiller, la petite Jeanne de Luxille — une maigriotte