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DEUX AMIES

Ces lettres que sa femme relisait avec une telle passion l’inquiétèrent. Ne venaient-elles pas d’un amant ? Pourquoi Jeanne les enfermait-elle aussi peureusement ?

Il se posait toutes ces questions et, dans sa patience fureteuse de mari jaloux, il parvint à ouvrir le chiffonnier. Les formules tendres qui commençaient le texte de chaque lettre donnèrent d’abord le change à M. de Tillenay. Mon cher cœur, mon mignon chéri, mon trésor adoré, cette litanie molle et brûlante de mots amoureux, cette langue d’oreiller, ne pouvaient s’adresser qu’à un homme. Mais la suite le rasséréna comme l’annonce d’une bonne nouvelle. L’imbécile se réjouissait de sa découverte. C’était plutôt de sa part une bêtise profonde qu’une dépravation de blasé.

Il préférait bien que Jeanne s’enlisât jusqu’aux reins, jusqu’au cou dans son vice préféré. Les conséquences de ces infidélités ne l’épouvantaient pas. Elles ne l’empêcheraient pas de conserver sa dignité de mari heureux qui est sûr de la vertu de sa femme. Elles préserveraient Mme de Tillenay des tentations