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donner pour gagner du temps. Il sait fort bien que ces ordres, que je lui donne d’assez mauvaise humeur, ne sont que des prétextes pour rester au lit sans paraître le désirer. Il ne fait pas semblant de s’en apercevoir, et je lui en suis vraiment reconnaissant.

Enfin, lorsque j’ai épuisé toutes mes ressources, il s’avance au milieu de la chambre, et se plante là, les bras croisés, dans la plus parfaite immobilité.

On m’avouera qu’il n’est pas possible de désapprouver ma pensée avec plus d’esprit et de discrétion : aussi je ne résiste jamais à cette invitation tacite ; j’étends les bras pour lui témoigner que j’ai compris, et me voilà assis.

Si le lecteur réfléchit sur la conduite de mon domestique, il pourra se convaincre que, dans certaines affaires délicates, du genre de celle-ci, la simplicité et le bon sens valent infiniment mieux que l’esprit le plus adroit. J’ose assurer que le discours le plus étudié sur les inconvénients de la parole ne me déciderait pas à sortir aussi promptement de mon lit que le reproche muet de M. Joannetti.

C’est un parfait honnête homme que M. Joannetti, et en même temps celui de tous les hommes qui convenait le plus à un voyageur comme moi.