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entendre : « Amis ! ouvrez Grâce ! grâce aussi pour vous ! Ouvrez ! »

Aucune langue ne peut décrire une semblable situation. Pendant quelques minutes on n’entend que des phrases entrecoupées : « Grâce ! l’empereur ! Que Dieu le bénisse ! Que Dieu soit loué ! Qu’il comble de ses faveurs la bonne Prascovie, qui ne nous a pas oubliés ! » Jamais habitation humaine n’avait renfermé des êtres plus heureux ; jamais il n’exista de passage plus rapide Ou comble de l’infortune au bonheur le plus inespéré.

Le capitaine ispravnik ayant appris, en rentrant chez lui, qu’un feldiègre le cherchait, courut lui-même chez les deux amis, et décacheta la dépêche, qui contenait deux passe-ports pour eux et une lettre de Prascovie à son père. Elle écrivait qu’après avoir obtenu cette nouvelle grâce elle n’aurait osé solliciter encore des secours pour le voyage de ses anciens compagnons ; mais que Dieu y avait pourvu en récompense de l’offre généreuse qu’ils lui avaient faite lors de son départ de Sibérie : elle avait joint à sa lettre la somme de deux cents roubles en assignations.

Cependant elle attendait à Kiew, avec la plus vive impatience, la nouvelle du retour de son père ; il lui semblait, en faisant le calcul du temps, qu’il aurait pu lui écrire.