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Ils étaient à peine endormis, qu’ils entendent frapper fortement à la porte ; le même feldiègre [1], qui leur avait apporté la bonne nouvelle, n’ayant pas trouvé le capitaine ispravnick [2] auquel était adressée la dépêche, et connaissant leur logement, revenait avec la grâce des deux amis. Lopouloff se leva précipitamment pour le conduire chez eux.

Les deux malheureux s’étaient retirés dans le plus affreux désespoir. En rentrant dans leur chaumière déserte, ils s’assirent sur un banc dans l’obscurité, et gardèrent un profond silence. Que pouvaient-ils se dire ? Ils avaient perdu toute espérance, et l’exil éternel pesait maintenant sur eux avec une nouvelle force.

Depuis deux heures ils souffraient à la fois leurs maux présents et ceux que leur présageait un sombre avenir, lorsque la lueur d’une lanterne vint éclairer tout à coup la petite fenêtre de leur réduit : ils écoutent : plusieurs personnes marchent et parlent auprès de la chaumière. On frappe ; une voix amie et bien connue se fait

  1. Mot tiré de l’allemand, qui signifie chasseur de campagne. Les feldiègres sont un corps avec des grades et un habit militaires : ils remplissent en Russie les fonctions de courrier d’État et de cabinet.
  2. Les capitaines ispravniks ont à peu près les mêmes fonctions que celles de nos sous-préfets.