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faite et la familiarité bien établie, Prascovie développa le plan qu’elle avait formé pour obtenir la délivrance de son père, et conta les démarches infructueuses qu’elle avait déjà faites au sénat. M. de L*** examina sa supplique, et trouva qu’elle n’était pas dressée dans les formes.

« Personne mieux que moi, lui dit-il, n’aurait pu vous aider dans cette affaire : un de mes proches parents occupe un emploi d’assez grande importance au sénat ; mais je vous avouerai, comme je le ferais à une ancienne connaissance et à une amie, que nous sommes brouillés depuis quelque temps. Cependant l’occasion est trop belle, et la brouillerie de trop peu d’importance, pour que j’hésite à faire les premiers pas ; nous voilà d’ailleurs au temps de Pâques, et je serai charmé que vous soyez la cause de notre réconciliation. »

On garda la jeune fille à dîner ; plusieurs convives arrivèrent peu à peu, et lui témoignèrent le plus vif intérêt. Au moment où l’on allait se mettre à table, le parent dont on a parlé se présenta tout à coup dans la salle à manger, en disant « Christos voscres, » suivant l’usage au temps de Pâques [1]. Il n’y eut point d’autre explication

  1. Il est d’usage en Russie d’embrasser ses amis et ses connaissances la première fois qu’on les rencontre dans la semaine de Pâques : le plus empressé dit en embrassant : Christos voscres (Christ est ressuscité) ; l’autre répond Voistino voscres (en vérité, il est ressuscité).