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pour les fêtes de Noël. Les conducteurs lui donnèrent une place sur un de leurs traîneaux. Cependant, malgré les soins que ces braves gens prenaient d’elle, ses habits n’étant pas assortis à la saison, elle avait bien de la peine à supporter la rigueur de l’hiver, enveloppée dans une des nattes destinées à couvrir les marchandises. Le froid devint si violent pendant la quatrième journée, que, lorsque le convoi s’arrêta, la voyageuse, transie, n’eut pas la force de descendre du traîneau. On la transporta dans le kharstma [1], auberge isolée à plus de trente verstes de toute habitation, et où se trouvait la station de la poste aux chevaux. Les paysans s’aperçurent qu’elle avait une joue gelée, et la lui frottèrent avec de la neige, en prenant le plus grand soin d’elle ; mais ils refusèrent absolument de la conduire plus loin, et lui représentèrent qu’elle courrait le plus grand danger en s’exposant à voyager sans pelisse par un froid si vif, et qui ne manquerait pas d’augmenter encore. La jeune fille se mit à pleurer amèrement, prévoyant qu’elle ne trouverait plus une occasion aussi favorable et d’aussi

  1. Les kharstma sont de grands hangars couverts où s’arrêtent les voyageurs, comme dans les caravansérails de l’Orient et les ventas d’Espagne excepté le toit, on n’y trouve que ce qu’on y apporte.