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Des petits garçons qui l’avaient suivie, et qui s’étaient attroupés autour d’elle lorsque la femme la maltraitait, continuèrent à l’insulter et à la traiter de voleuse. Elle demeura près de deux heures dans cette situation pénible, se mourant de froid, d’inanition, priant Dieu de l’assister et de lui donner la force de supporter cette épreuve.

Cependant une femme s’approcha pour l’interroger. Prascovie raconta l’affreuse nuit qu’elle avait passée dans le bois ; d’autres paysans s’arrêtèrent pour l’entendre. Le starost [1] du village examina son passe-port, et déclara qu’il était en règle : alors la bonne femme attendrie lui offrit sa maison ; mais lorsque la voyageuse voulut se soulever, ses membres étaient tellement engourdis qu’on fut obligé de la soutenir. Elle avait perdu un de ses souliers, elle montra son pied nu et ses jambes enflées. Une pitié générale succéda bientôt aux indignes soupçons qui l’avaient fait maltraiter. On la plaça sur un chariot ; et les mêmes enfants qui l’avaient insultée quelques moments auparavant s’empressèrent de la traîner, et la conduisirent ainsi chez la villageoise, qui la reçut avec beaucoup d’amitié, et chez laquelle elle passa

  1. Starost, de l’adjectif staori, vieux ou ancien, est en Russie ce que sont les maire ; en France, les schullz ou baillis en Allemagne.