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Un ordre absolu de son père put seul la lui faire accepter. Les deux pauvres exilés voulurent aussi contribuer au petit fonds qu’elle emportait pour le voyage ; l’un offrit trente kopecks en cuivre, et l’autre une pièce de vingt kopecks en argent ; c’était leur subsistance de plusieurs jours. Prascovie refusa leur offre généreuse, mais elle en fut vivement touchée : « Si la Providence, leur dit-elle, accorde jamais quelque faveur à mes parents, j’espère que vous en aurez une part. »

Dans ce moment, les premiers rayons du soleil levant parurent dans la chambre. « L’heure est venue, dit-elle ; il faut nous séparer. » Elle s’assit, ainsi que ses parents et les deux amis, comme il est d’usage en Russie en pareille circonstance. Lorsqu’un ami part pour un voyage de long cours, au moment de faire les derniers adieux, le voyageur s’assied ; toutes les personnes présentes doivent l’imiter : après une minute de repos, pendant laquelle on parle du temps et de choses indifférentes, on se lève, et les pleurs et les embrassements commencent.

Cette cérémonie, qui au premier coup d’œil paraît insignifiante, a cependant quelque chose d’intéressant. Avant de se séparer pour longtemps, peut-être pour toujours, on se repose encore quelques