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assignée aux prisonniers qui ne sont pas condamnés aux travaux publics.

La jeune Prascovie contribuait par son travail à la subsistance de ses parents, en aidant les blanchisseuses du village ou les moissonneurs, et en prenant part à tous les ouvrages de la campagne dont ses forces lui permettaient de s’occuper elle rapportait du blé, des œufs ou quelques légumes en payement. Arrivée en Sibérie dans son enfance, et n’ayant aucune idée d’un meilleur sort, elle se livrait avec joie à ces pénibles travaux, qu’elle avait bien de la peine à supporter. Ses mains délicates semblaient avoir été formées pour d’autres occupations. Sa mère, tout entière aux soins du pauvre ménage, semblait prendre en patience sa déplorable situation ; mais son père, accoutumé dès sa première jeunesse à la vie active des armées, ne pouvait se résigner à son sort, et s’abandonnait souvent à des accès de désespoir que l’excès même du malheur ne saurait justifier.

Quoiqu’il évitât de laisser voir à Prascovie les chagrins qui le dévoraient, elle avait été plus d’une fois témoin de ses larmes à travers les fentes d’une cloison qui séparait son réduit de la chambre de ses parents, et elle commençait depuis quelque temps à réfléchir sur leur cruelle destinée.