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de soupçon à leur gardien. Comme ils étaient dans l’habitude de chanter ensemble des chansons russes, le major prenait sa guitare lorsqu’il avait quelque chose d’important à communiquer à Ivan en présence d’Ibrahim, et chantait en l’interrogeant : celui-ci répondait sur le même ton, et son maître l’accompagnait avec sa guitare. Cet arrangement n’étant point une nouveauté, on ne s’aperçut jamais d’une ruse qu’ils eurent d’ailleurs la précaution de n’employer que rarement.

Plus de trois mois s’étaient écoulés depuis l’expédition malheureuse dont il a été question, lorsque Ivan crut s’apercevoir d’une agitation extraordinaire dans le village. Quelques mulets chargés de poudre étaient arrivés de la plaine. Les hommes nettoyaient leurs armes et préparaient des cartouches. Il apprit bientôt qu’une grande expédition se préparait. Toute la nation devait se réunir pour attaquer une peuplade voisine qui s’était mise sous la protection des Russes, et qui leur avait permis de construire une redoute sur son territoire. Il ne s’agissait pas de moins que d’exterminer toute la peuplade, ainsi que le bataillon russe qui protégeait la construction du fort.

Quelques jours après, Ivan, en sortant de la cabane le matin, trouva le village désert. Tous les hommes en état de porter les armes étaient sortis