Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/274

Cette page n’a pas encore été corrigée

curer, et pendant l’abstinence forcée qu’on avait fait souffrir au major, le jeune Mamet, touché de compassion, profitait adroitement de l’absence momentanée de ses parents pour lui apporter du pain ou des pommes de terre cuites sous la cendre.

Quelques mois s’étaient écoulés depuis l’envoi de la lettre, sans événement remarquable. Pendant cet intervalle, Ivan avait su gagner la bienveillance de la femme et du vieillard, ou du moins était parvenu à se rendre nécessaire. Il savait tout l’art qui peut entrer dans la cuisine d’un officier de détachement. Il faisait à merveille le kislitchi [1], préparait les concombres salés, et avait accoutumé ses hôtes aux petites douceurs qu’il introduisait dans leur ménage.

Pour obtenir plus de confiance, il s’était mis avec eux sur le pied d’un bouffon imaginant chaque jour Quelque nouvelle plaisanterie pour les amuser : Ibrahim aimait surtout à lui voir danser la cosaque. Lorsque quelque habitant du village venait les visiter, on ôtait à Ivan ses fers, et on le faisait danser ; ce qu’il exécutait toujours de bonne grâce, en ajoutant à chaque fois quelque gambade ridicule de plus. Il s’était procuré par cette conduite constante la liberté de parcourir le village,

  1. Boisson russe c’est une espèce de Bière faite avec de la farine.