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consolantes. Le sentiment de la solitude s’adoucit aussi par le travail. L’homme qui travaille n’est jamais complètement malheureux, et j’en suis la preuve. Pendant la belle saison, la culture de mon jardin et de mon parterre m’occupe suffisamment. Pendant l’hiver, je fais des corbeilles et des nattes ; je travaille à me faire des habits ; je prépare chaque jour moi-même ma nourriture avec les provisions qu’on m’apporte de l’hôpital, et la prière remplit les heures que le travail me laisse. Enfin l’année s’écoule, et, lorsqu’elle est passée, elle me paraît encore avoir été bien courte.


LE MILITAIRE.

Elle devrait vous paraître un siècle.


LE LÉPREUX.

Les maux et les chagrins font paraître les heures longues ; mais les années s’envolent toujours avec la même rapidité. Il est d’ailleurs encore, au dernier terme de l’infortune, une jouissance que le commun des hommes ne peut connaître, et qui vous paraîtra bien singulière : c’est celle d’exister et de respirer. Je passe des journées entières de la belle saison, immobile sur ce rempart, à jouir de l’air et de la beauté de la nature : toutes mes idées alors sont vagues, indécises ; la tristesse repose dans mon cœur sans l’accabler ; mes regards errent sur