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priété de changer le cours de mes idées lorsqu’elles s’acheminent mal. L’effet en fut si prompt que je terminai sur le champ ma promenade à cheval.

Chapitre XXXVIII

Avant de rentrer dans ma chambre, je jetai un coup d’œil sur la ville et la campagne sombre de Turin, que j’allais quitter peut-être pour toujours, et je leur adressai mes derniers adieux. Jamais la nuit ne m’avait paru si belle ; jamais le spectacle que j’avais sous les yeux ne m’avait intéressé si vivement. Après avoir salué la montagne et le temple de Supergue, je pris congé des tours, des clochers, de tous les objets connus que je n’aurais jamais cru pouvoir regretter avec tant de force, et de l’air et du ciel, et du fleuve dont le sourd murmure semblait répondre a mes adieux. Oh ! si je savais peindre le sentiment tendre et cruel à la fois, qui remplissait mon cœur, et tous les souvenirs de la belle moitié de ma vie écoulée, qui se pressaient autour de moi, comme des farfadets,