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Mais cela vous étonne-t-il ? Ne voit-on pas tous les jours des personnes qui se croient malades parce qu’elles ont la barbe longue, ou parce que quelqu’un s’avise de leur trouver l’air malade et de le dire ? Les vêtements ont tant d’influence sur l’esprit des hommes, qu’il est des valétudinaires qui se trouvent beaucoup mieux lorsqu’ils se voient en habit neuf et en perruque poudrée : on en voit qui trompent ainsi le public et eux-mêmes par une parure soutenue ; — ils meurent un beau matin tout coiffés, et leur mort frappe tout le monde.

On oubliait quelquefois de faire avertir plusieurs jours d’avance le comte de… qu’il devait monter la garde. — Un caporal allait l’éveiller de grand matin le jour même où il devait la monter, et lui annoncer cette triste nouvelle ; mais l’idée de se lever, de mettre ses guêtres, et de sortir ainsi sans y avoir pensé la veille, le troublait tellement, qu’il aimait mieux faire dire qu’il était malade et ne pas sortir de chez lui. Il mettait donc sa robe de chambre et renvoyait le perruquier ; cela lui donnait un air pâle, malade, qui alarmait sa femme et toute sa famille. — Il se trouvait réellement lui-même un peu défait ce jour-là.

Il le disait à tout le monde, un peu pour sou-