Page:Maistre - Du pape suivi de l'Église gallicane, Goemaere, 1852.djvu/168

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
160
DE L’ÉGLISE GALLICANE

la justice, suggérèrent la déclaration du mois de février 1673, qui étendait la régale à tous les évêchés du royaume.

Une de leurs raisons pour généraliser ce droit, c’est que la couronne de France était ronde[1]. C’est ainsi que ces grands jurisconsultes raisonnaient.

Tout le monde connaît les suites de cette entreprise. Les étrangers en furent scandalisés, et Leibnitz surtout s’exprima de la manière la moins équivoque sur les parlements, « qui se conduisaient, dit-il, non comme des juges, mais comme des avocats, sans même sauver les apparences et sans avoir égard à la moindre ombre de justice, lorsqu’il était question des droits du roi[2]. »

Fleury, dans la maturité de l’âge et des réflexions, parle absolument comme Leibnitz. « Le parlement de Paris, dit-il, qui se prétend si zélé pour nos libertés, a étendu le droit de régale à l’infini, sur des maximes qu’il est aussi aisé de nier que d’avancer[3]. Ses arrêts sur la régale étaient insoutenables. »

« Le roi, dit l’excellent historien de Bossuet, exerçait le droit de régale avec une plénitude d’autorité qu’on avait de la peine à concilier avec l’exactitude des maximes ecclésiastiques. » Un peu plus haut il avait dit « que l’affaire de la régale avait entraîné le gouvernement dans des mesures dont la nécessité ou la régularité aurait été peut-être difficile à justifier[4]. »

Ce qui signifie en français moins élégant, que l’extension de la régale n’était qu’un brigandage légal.

Mais Louis XIV le voulait ainsi, et devant cette volonté tout devait plier, même l’Église ; aucune raison, aucune dignité ne pouvait lui en imposer.

« Arrivé au comble de la gloire, il indisposa, dépouilla ou humilia presque tous les princes[5]. » Au-dessus, dans sa pen-

  1. Opuscales de Fleury, p. 137 et 140.
  2. Vid. sup. Article des parlements.
  3. Opuscules de Fleury, p. 83, 137 et 140.
  4. Hist. de Bossuet, liv. VI, n° " VIII, p. 130 et 138
  5. Siècle de Louis XIV, par Voltaire, tom. II, chap XIV.