Page:Maistre - Du pape suivi de l'Église gallicane, Goemaere, 1852.djvu/161

Cette page a été validée par deux contributeurs.

drir ni convertir cette secte ; mais c’est ici surtout où il est bon de la comparer à ses nobles adversaires. Ils avaient sans doute beaucoup à se plaindre d’un gouvernement qui, dans sa triste décrépitude, les avait traités avec tant d’inhumanité et d’ingratitude ; cependant rien ne peut ébranler leur foi ni leur zèle, et les restes déplorables de cet ordre célèbre, ranimant dans le moment le plus terrible leurs forces épuisées, purent encore fournir vingt-deux victimes au massacre des Carmes.

Ce contraste n’a pas besoin de commentaire. Que les souverains de la France se rappellent les dernières paroles de Fénélon ! qu’ils veillent attentivement sur le jansénisme ! Tant que la serpe royale n’aura pas atteint la racine de cette plante vénéneuse, elle ne cessera de tracer dans le sein d’une terre qu’elle aime, pour jeter ensuite plus loin ses dangereux rejetons. La protéger, l’épargner même, serait une faute énorme. « Cette faction dangereuse n’a rien oublié depuis sa naissance pour diminuer l’autorité de toutes les puissances ecclésiastiques et séculières qui ne lui étaient pas favorables[1]. » Tout Français, ami des jansénistes, est un sot ou un janséniste. Quand je pourrais pardonner à la secte ses dogmes atroces, son caractère odieux, sa filiation et sa paternité également déshonorantes, ses menées, ses intrigues, ses projets et son insolente obstination, jamais je ne lui pardonnerais son dernier crime, celui d’avoir fait connaître le remords au cœur céleste du roi martyr. Qu’elle soit à jamais maudite l’indigne faction qui vint, profitant sans pudeur, sans délicatesse, sans respect, des malheurs de la souveraineté esclave et profanée, saisir brutalement une main sacrée et la forcer de signer ce qu’elle abhorrait. Si cette main, prête à s’enfermer dans la tombe, a cru devoir tracer le témoignage solennel d’un profond repentir, que cette confession sublime, consignée dans l’immortel testa-

  1. Réquisitoire de l’avocat général Talon, du 23 janvier 1688, transcrit dans les Opuscules de Fleury, p. 18.

    Talon disait, en 1688 : Depuis trente ans.