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CHAPITRE VII.


PERPÉTUITÉ DE LA FOI. LOGIQUE ET GRAMMAIRE DE PORT-ROYAL.


L’usage fatal que les solitaires de Port-Royal firent de la langue française leur procura cependant un grand avantage, celui de paraître originaux, lorsqu’ils n’étaient que traducteurs ou copistes. Dans tous les genres possibles de littérature et de sciences, celui qui se montre le premier avec un certain éclat s’empare de la renommée, et la conserve même après qu’il a été souvent surpassé depuis. Si le célèbre Cervantes écrivait aujourd’hui son roman, peut-être qu’on ne parlerait pas de lui, et certainement on en parlerait beaucoup moins. Je citerai, sur le sujet que je traite ici, l’un des livres qui font le plus d’honneur à Port-Royal, la Perpétuité de la Foi. Lisez Bellarmin, lisez les frères Wallembourg, lisez surtout l’ouvrage du chanoine régulier Garet[1], écrit précisément sur le même sujet, et vous verrez que de cette foule de textes cités par Arnaud et Nicole, il n’y en a peut-être pas un seul qui leur appartienne ; mais ils étaient à la mode, ils écrivaient en français ; Arnaud avait des parents et des amis influents, ils tenaient à une secte puissante. Le Pape, pour sceller une paix apparente, se croyait

  1. Joh. Garetii de veritate corporis Christi in eucharistiâ. Antuerp., 1569, in-8o. Quelle dame française a jamais dit : Ah ! ma chère, avez-vous lu Garet ? Mille l’auront dit de la Perpétuité de la Foi lorsqu’elle parut.