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chap. 2e.
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ARBRES ET ARBUSTES FORESTIERS INDIGENES.


légère et ombragée. On les arrose de temps en temps si la saison est sèche, et on les débarrasse des mauvaises herbes. À 2 ou 3 ans au plus, si on a laissé le semis en place, en ne faisant que l’éclaircir, les plus beaux sujets sont bons à être plantés à demeure. Cet arbre réussit bien dans les terres sableuses, plus sèches qu’humides : il n’est pas nécessaire que le sol ait beaucoup de fond ; il suffit seulement que la superficie soit de bonne terre, parce que les racines ne pivotent pas, mais s’étendent beaucoup en traçant.

Le robinier croît bien plus rapidement que tous les bois durs qu’on pourrait lui comparer ; il n’est pas rare d’en voir qui, ayant crû dans un terrain convenable, ont 2 pieds ½ de circonférence à hauteur d’homme à l’âge de 15 ans ; le plus souvent, cependant, il faut 20 années pour les voir de cette grosseur. Cet arbre a l’inconvénient d’être sujet à être assez souvent éclaté par les vents. On doit éviter, d’ailleurs, de le planter sur la lisière des champs cultivés, parce que ses racines traçantes nuisent aux récoltes.

Malgré la croissance rapide du robinier, son bois est fort dur et pesant ; il est jaune, avec des veines un peu plus foncées ; il a le grain fin, serré, se coupe bien au rabot, et est susceptible de prendre un beau poli, ce qui le rend propre à être employé par les menuisiers et les ébénistes. Il est aussi très-bon pour divers ouvrages de tour. Comme l’arbre devient gros, il pourrait aussi sans doute être employé comme bois de charpente. Dans les États-Unis, on s’en sert fréquemment pour diverses parties des constructions navales. Comme c’est un des bois qui résistent le plus à la pourriture, on l’emploie beaucoup dans ce pays à faire des pieux et des palissades de clôtures qui durent 30 à 40 ans, exposées à toutes les alternatives de la sécheresse et de l’humidité. On peut aussi en faire des pilotis. C’est un bon bois de chauffage.

Cultivé en taillis, il est bon à couper tous les 4 à 5 ans pour faire des échalas, des cercles, et il peut donner ainsi des produits abondans et avantageux ; seulement les épines qui garnissent ses tiges et ses rameaux le rendent plus difficile à exploiter. Il y a 20 et quelques années qu’on a obtenu de cette espèce une variété dépourvue d’aiguillons, qui fut nommée R. spectabilis ; il serait à désirer qu’on pût la multiplier assez par marcottes pour la substituer dans les taillis à l’espèce épineuse.

Les haies et les clôtures qu’on peut faire avec cette dernière ont l’avantage d’être promptement de défense ; mais elles ne valent jamais celles d’aubépine. Comme on a beaucoup semé cette espèce, on en a obtenu un assez grand nombre de variétés qui sont cultivées dans les jardins d’agrément.

Les fleurs du faux-acacia sont, dit-on, antispasmodiques ; on en a préparé un sirop. On est parvenu, par une préparation particulière, à en retirer, ainsi que du bois lui ; même, une teinture jaune. L’écorce des tiges et des branches est émétique. Les bestiaux broutent volontiers les feuilles fraiches ; en les recueillant et en les faisant sécher, on peut les conserver, et les leur donner pendant l’hiver comme fourrage sec.

21. SORBIER (lat. Sorbus). — Les sorbiers sont des arbres de la famille des Rosacées, dont les fleurs ont un calice à 5 divisions, adhérant dans sa partie inférieure avec l’ovaire, 5 pétales arrondis, 20 étamines ou plus attachées sur le calice et un ovaire turbiné ou globuleux, qui devient une petite pomme globuleuse ou pyriforme à 5 loges, dans chacune desquelles se trouvent une ou deux graines. Ce genre ne renferme que 4 espèces, dont deux sont indigènes de nos forêts.

Sorbier des oiseaux, ou Cochesne (lat. S. aucuparia, Lin. ; angl. Mountain-ash ; all. Eberesche ; ital. Sorbo). — Cette espèce ne s’élève qu’à 20 ou 30 pieds ; ses feuilles sont grandes, ailées, composées de 13 à 17 folioles oblongues, dentées, légèrement pubescentes dans leur jeunesse ; ses fleurs, qui se développent au mois de mai, sont blanches, nombreuses, légèrement odorantes, disposées au sommet des rameaux en un large corymbe ; il leur succède des fruits arrondis de la grosseur d’une petite cerise et presque de la même couleur. Cet arbre est plutôt d’agrément que de valeur ; on le plante communément dans les jardins paysagers, dont il fait l’ornement. Beaucoup d’oiseaux, comme les grives, les merles, les poules, etc., recherchent ses fruits pour s’en nourrir, et plusieurs bestiaux paraissent aussi les manger avec plaisir. Dans quelques contrées du nord on les récolte, on les met fermenter avec de l’eau, et on en compose une boisson qui n’est pas désagréable, et de laquelle on peut même retirer de l’eau-de-vie par la distillation.

Le bois du sorbier des oiseaux est assez dur, blanchâtre ; il a le grain fin, serré, se travaille facilement et se polit bien. Les tourneurs s’en servent pour divers ouvrages ; on en fait aussi des montures d’outils ; mais comme il est moins commun et qu’il ne devient jamais très-gros, on lui préfère le sorbier domestique, qui réunit ces deux avantages. Il se multiplie facilement de graines ; mais le plus ordinairement les pépiniéristes préfèrent le greffer sur l’alizier, l’aubépine ou le néflier. Il n’est d’ailleurs pas délicat, et il vient partout où le terrain n’est pas trop aride ou trop humide.

Sorbier domestique, vulgairement Cormier (S.domestica, Lin.) (fig. 54).— Cette espèce s’élève à 40 ou 50 pieds ; ses feuilles sont formées d’environ 15 folioles ovales-oblongues, vertes en-dessus, blanchâtres et velus en-dessous ; ses fleurs, petites, blanchâtres, paraissent en mai. et sont disposées, un grand nombre ensemble, sur des pédoncules rameux, et forment un corymbe terminal. Il leur succède des fruits d’abord verts, puis jaunâtres ou rougeâtres dans la parfaite maturité, ayant la forme d’une petite poire, et connus sous le nom de sorbes ou de cormes. Cet arbre croit naturellement, en France et dans plusieurs autres contrées de l’Europe, dans les forêts ; on le cultive dans les campagnes, mais pas aussi abondamment qu’il le mériterait.

Ou multiplie quelquefois le cormier en le greffant sur le poirier ou sur l’aubépine, mais les arbres venus de graines sont toujours plus beaux ; il faut semer celles-ci aussitôt la parfaite maturité des fruits, ou les stratifier dans le sable jusqu’au moment où l’on lait