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chap. 9e.
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DE L’ÉTABLISSEMENT ET DE LA CONSTRUCTION DES ÉTANGS.


étang pourvu d’une bonde de 50 centimètres de petit diamètre et de 3 mètres et demi de hauteur de chaussée ; par suite, le puits aura 1 mètre de grand diamètre. Cette dimension de bonde peut convenir à un assez grand étang de 15 à 20 hectares, puisqu’avec une charge moyenne de 2 mètres d’eau elle peut, en vingt-quatre heures, en débiter 60,000 mètres cubes qui sont à peu près le tiers de l’eau que contient un étang de 20 hectares et de 3 mètres de profondeur ; un pareil étang avec cette bonde se viderait donc en trois jours, évacuation aussi prompte qu’il est convenable de la faire.

Maintenant estimons 8 francs 50 centimes le mètre cube de pierre rendue sur place, 5 francs 50 centimes le tonneau ou les 2 hectolitres de chaux ; le sable, assez ordinairement pris sur place, a peu de valeur ; cependant portons-le à 1 franc le tombereau. Comptant au prix ordinaire la façon du maçon, le mètre cube de maçonnerie reviendra à peu près à 15 francs 50 centimes, prix dont un cinquième au moins est pour la voiture.

En supposant à l’étang 3 mètres de profondeur vers la chaussée, la chaussée aura, suivant les plus grandes dimensions, 7 mètres de terre-plein et 14 mètres de base ; ce sera donc 14 mètres de longueur de canal à construire.

Supposons le canal de vidange rectangulaire de 50 centimètres de largeur sur 40 de hauteur ; en le couvrant d’une voûte à laquelle on donnera 10 centimètres de flèche, la hauteur du sommet de la voûte sera de 40 centimètres au-dessus du fond du canal, et les murs de côté, ou pieds droits, auront 30 centimètres de hauteur, auxquels on en ajoutera 10 pour les fondations. En admettant que chacun de ces murs ait 30 centimètres d’épaisseur, ce qui est au delà du besoin, les murs d’à-côté cuberont 3,36 mètres cubes et coûteront par conséquent 52 francs ; la dalle portant l’œil de la bonde, de 10 à 12 centimètres d’épaisseur et de 1 mètre sur 1 mètre 30 centimètres, pourra coûter 20 francs.

Quant à la voûte, il y aura économie, comme nous l’avons précédemment dit, à la faire en briques placées sur leur longueur ; il faudra pour un mètre de longueur de voûte à peu près trente-trois briques. En les mettant à 5 francs le cent, prix ordinaire dans les pays où les fabriques sont presque partout à portée, le mètre courant de voûte, chaux, façon et cintre compris, reviendra à peu près à 2 francs 50 centimes, ce qui met les 14 mètres de voûte à 35 francs, ou en tout, le canal voûté coûterait, avec la dalle de la bonde, 107 francs, soit 120 francs en revêtissant en pierre de taille l’entrée et la sortie du canal.

Le puits de 1 mètre de diamètre, qui s’élèvera à 3 mètres de hauteur, soit à 50 centimètres au-dessous du niveau de la chaussée, cubera à peu près 3 mètres, en supposant au mur 30 centimètres d’épaisseur : à cause de l’ébauche des pierres, nous porterons sa construction à 50 francs.

Le collet en pierre qui recouvre le puits coûtera, avec la feuillure, 15 francs ; et la dalle fermant le puits avec un petit anneau scellé, destiné à recevoir une corde pour la soulever, pourra valoir 7 à 8 francs ; en tout, le puits s’élèvera à 73 francs.

La ferrure du pilon avec ses traverses coûtera 24 francs, façon comprise ; le pilon lui-même, pour lequel il faut un morceau sain et choisi, sans aubier, de 60 centimètres au moins de diamètre, et de 30 à 33 de hauteur, peut coûter, avec sa façon, 10 francs.

Nous ne compterons pas tous les terrassements à faire dans cette construction ; comme nous devons la comparer à l'ancienne, il nous suffira de porter en compte le surplus de terrassements qu’elle nécessite et qui peut s’élever au plus à 5 francs.

Si l’on veut faire la construction toute en pierre, il en faudra un peu moins d’une toise ; si l’on voûte le canal et si l’on construit le puits en briques, combinaison qui semble la meilleure, une demi-toise de pierre suffira avec onze ou douze cents briques ; et si l’on fait tout en briques, deux milliers et demi suffiront.

Dans ce cas, il n’est pas sans importance de se procurer de la pierre pour l’entrée et la sortie du canal, parce que ces deux points sont, dans toute la construction, les seuls exposés aux gels, dégels et aux alternatives d’humidité et de sécheresse. Il serait encore convenable que le couronnement du puits, sujet à dégradation, fût en pierre ; il y aura, en général, en employant les briques, moitié à peu près d’économie de main-d’œuvre, parce que la brique, pour le puits, le canal voûté et toute la maçonnerie, se met en place sans préparation, pendant qu’il faut beaucoup de travail pour ébaucher les pierres.

Mais un soin auquel il faut astreindre sévèrement les ouvriers, c’est de tremper dans l’eau chaque brique avant de l’employer, parce qu’autrement la brique sèche à l’instant le mortier et lui ôte par là les moyens de faire bonne prise.

Il est aussi fort essentiel d’avoir de bonne chaux, c’est-à-dire de la chaux hydraulique ou chaux maigre. Pour toute maçonnerie en terre, dans l’eau ou à couvert, pour de la maçonnerie surtout qui a besoin de faire promptement prise, la chaux hydraulique a un avantage incontestable. Le dernier thou que nous avons construit a été, le lendemain de son achèvement, assailli d’une grande abondance d’eau ; il en est sorti sans aucun dommage, et il est à peu près sûr qu’avec de la chaux ordinaire il eût été entraîné, et avec lui peut-être une partie de la chaussée. Cette chaux doit être employée vive ; sa prise est plus forte et plus prompte ; d’ailleurs, quatre à cinq tonneaux de chaux suffiront pour la construction en question.

On doit prendre soin, encore plus que dans toute autre maçonnerie, que les matériaux soient placés à bain de mortier pour boucher tout passage aux eaux et faire de toute la construction un seul ensemble.

On couvrira de mortier les reins des voûtes et le hors-d’œuvre du puits ; ce mortier de chaux hydraulique se lie bien avec la terre, à laquelle il fait faire une demi-prise.

En récapitulant les prix ci-dessus établis, on aura pour la dépense entière du thou en pierre d’un étang à bonde de 50 centimètres de diamètre, 232 francs, ou, pour parer aux événements, 260 francs, prix dont un cinquième à peu près se compose de frais de transports.

Si nous voulons maintenant comparer cette dépense à celle de la construction en bois, nous remarquerons d’abord que, dans l’état actuel des choses, il serait difficile, ou tout au moins excessivement cher, d’établir des bâchasses creusées dans le bois, comme le sont toutes les anciennes. Nous supposerons donc que, pour plus d’économie, on fasse un canal de 50 centimètres de largeur sur 40 de hauteur, en plateaux de 10 centimètres d’épaisseur ; mais des plateaux de cette dimension ne se rencontrent pas ; il faudra donc, pour le fond, employer deux plateaux goujonnés, moussés et goudronnés, mettre en travers les plateaux de la couverte, et, si on ne peut en avoir de 40 centimètres pour les à-côtés, on augmenterait la largeur du canal en réduisant sa hauteur. L’un des inconvénients des bondes en bois, c’est de ne pouvoir être faites que dans les dimensions assez restreintes de la largeur des bois ; aussi on a été obligé de les multiplier ; dans les grands étangs, on ne les a le plus souvent que de 30 à 36 centimètres de diamètre, ce qui donne 33 centimètres à l’œil : or une bonde de 33 centimètres offre 85 centimètres de débouché, pendant que celle de 50 centimètres en offre 1 mètre 96 centimètres, ou une section d’écoulement plus que double.

Il faut aussi, pour cela, avoir des plateaux de choix, sans nœuds et sans aubier, qu’on trouverait difficilement à moins de 9 francs le mètre carré. Les quatre faces du canal donnant 2 mètres de développement de plateaux en bois travaillé, il faudra au moins 7 pieds de plateaux par pied courant de canal, en ayant égard aux pertes, aux fausses coupes, au dressement des plateaux ; le bois reviendra donc à 21 francs, soit, si l’on veut, à 20 francs le mètre courant, et, par conséquent, les 30 pieds (10 mètres) auxquels se réduit le canal, parce qu’il ne se fait qu’à travers la chaussée, coûteront 200 francs de bois, non compris la façon.

Maintenant, pour les deux colonnes, le chapeau et l’éparre inférieure, il faut du bois d’un pied au moins d’écarrissage, soit 36 pieds à 2 francs, qui font 72 francs ; le