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peu favorable à la végétation de la plupart des arbres ; il rendrait les travaux de culture matériellement difficiles, exigerait des labours et des binages trop fréquens, et, chose également fâcheuse, en retenant outre mesure l’humidité et en se pénétrant difficilement de la chaleur, il retarderait les progrès de la végétation. — Trop léger, il aurait l’inconvénient non moins grave de nécessiter, dans plusieurs circonstances, des arrosemens trop abondans et trop multipliés.

Fertilité du sol. — Aux yeux du pépiniériste, la richesse du sol n’est jamais trop grande. Plus les arbres végètent avec vigueur, mieux et plus tôt il en trouve le débit : or, c’est en renouvelant le plus possible les productions de chaque parcelle de ses cultures qu’il cherche à en augmenter le revenu. — Les propriétaires ont le plus souvent des intérêts différens. A moins qu’ils ne puissent planter en des fonds excellens, ils trouvent, comme la théorie l’indique et comme la pratique le démontre tous les jours, du désavantage à acheter des arbres sortis d’un terrain trop fécond ; en effet, ces mêmes arbres, qui ont pris, pendant leurs premières années, un développement proportionné à la nourriture abondante qui leur était fournie, lorsqu’ils changent de position, surtout après une transplantation qui diminue nécessairement le nombre et l’action vitale de leurs racines, ne trouvent plus les alimens suffisant pour fournir, je ne dirai pas seulement à leur luxueux accroissement, mais au seul maintien de l’existence dans toutes leurs parties. — Il est donc désirable que le sol d’une pépinière soit d’une fertilité moyenne. — Mieux vaudrait certainement qu’il fût trop fertile que trop pauvre.

Profondeur du sol. — Il est indispensable, pour la culture des grands végétaux ligneux, que la couche de terre végétale ait une certaine profondeur. En général, plus cette profondeur est considérable, mieux ils réussissent. Cependant, 5 à 7 décimètres (de 18 po. à moins de 2 pi.) peuvent rigoureusement suffire.

Exposition et situation.Quoique l’exposition et la situation dussent à vrai dire varier en raison de l’espèce et de l’état particulier de chaque culture, on doit préférer, en général, celles qui sont naturellement a britées contre les vents violens qui pourraient briser ou déraciner les arbres, les vents froids qui arrêteraient la marche de la végétation, et les vents desséchans qui pourraient l’entraver d’une manière fâcheuse au moment de son développement ; — celles qui ont le moins à redouter, dans le midi, la sécheresse produite par une excessive évaporation, et, dans le nord, l’humidité froide qu’on ne peut éviter dans les localités trop couvertes ; — celles enfin qui procurent les eaux les plus abondantes et de meilleure qualité dans le premier cas, et qui se prêtent le mieux à l’absorption et à l’écoulement des eaux surabondantes dans le second.

Quelles que soient les terres qu’on veut transformer en pépinières, la première chose à faire est de les défoncer convenablement au moyen de la pioche ou du pic et de la bêche. Ce que j’ai déjà dit de la profondeur du sol doit servir de guide dans cette opération. — S’il est de bonne nature, on se rappellera que les labours les plus profonds sont les meilleurs, et qu’une faible augmentation de dépense produira plus tard une notable augmentation dans les produits. — Si le sous- sol est de mauvaise qualité, il faudra, au contraire, éviter de l’entamer, ou, tout au moins, de le ramener en trop grande épaisseur à la surface, à moins de nécessité absolue. — Enfin, comme les meilleures terres, pour devenir productives, ont besoin d’être plus ou moins longtemps exposées au contact immédiat de l’air, et à l’action directe des divers météores atmosphériques, le défoncement devra être fait généralement le plus longtemps possible avant l’époque des semis ou des plantations.

Quoi qu’il en soit, le terrain ayant été ainsi remué, ameubli, débarrassé des pierres et des racines qui pourraient nuire à sa fertilité, ou gêner plus tard les travaux de labours, de plantations ou d’arrachages, il ne reste plus qu’à le diviser de manière à faciliter chaque sorte de culture et à éviter pour les ouvriers toute perte de temps.

Le professeur Thouin, dont le beau nom doit trouver si souvent place dans un ouvrage de pratique, proposait pour cela d’établir dans les pépinières six carrés principaux destinés : le premier aux semis, — le second aux repiquages, — le troisième aux transplantations, — le quatrième aux sauvageons et autres porte-greffes, — le cinquième aux marcottes, — et le sixième aux boutures.

Lorsque la qualité variée du sol ne conduit pas à adopter une division moins régulière, mais plus en harmonie avec les habitudes des différens végétaux, chacun de ces carrés peut encore être subdivisé en deux, trois ou quatre parties d’étendue calculée d’après les besoins de l’agriculture et de l’horticulture du pays, consacrées alternativement à la propagation particulière des arbres forestiers à feuilles caduques, des arbres verts, des arbres fruitiers, et des arbres et arbrisseaux d’ornement.

Nous n’aurons pas à nous occuper ici de ces derniers, et je ne devrai parler des autres qu’autant qu’ils font ou devraient faire partie de la culture des champs.

Section II. — Des semis.

§ Ier. — Avantages et inconvéniens

Les semis ont sur les marcottes et les boutures l’avantage à peu près incontesté de produire des individus d’une plus belle croissance et d’une plus grande longévité ; — ils servent à propager la plupart des espèces de nos arbres forestiers. — Les graines récoltées sur des variétés donnent naissance à de nouvelles variétés parfois préférables à celles dont elles proviennent. Une fois qu’elles se sont écartées des types, elles tendent à varier continuellement de nouveau. — C’est ainsi que nous avons obtenu et que nous obtenons encore divers fruits améliorés inconnus de nos ancêtres.

Les espèces présentent à la vérité moins sou-