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liv. iv.
ARTS AGRICOLES : DE LA BOULANGERIE.


d’un tube de verre dans la teinture d’iode concentrée, l’agiter dans la dissolution filtrée. La couleur bleu foncé qui se manifestera aussitôt par cette combinaison indiquera la fécule de pomme de terre, et chaque couche, d’un gramme, soumise à cette épreuve, qui donnera ce résultat, constatera une addition de 5 p. 0/0 de fécule de pomme de terre sur les 20 grammes de la farine qu’on aura essayée. Lorsque la farine sera pure, la dissolution filtrée ne prendra, au contact de l’iode, qu’une très légère teinte jaunâtre qu’elle perdra quelques minutes après. »

Section XVI. — Du pain de riz.

Depuis long-temps on a essayé la panification du riz. M. Parmentier, qui dans ces questions forme autorité, a toujours regardé cette panification comme une chimère. Il prétend que l’addition du riz cuit en diverses proportions avec la farine de froment rend le pain qui en provient compacte, fade et indigeste. Pour nous, nous disons du riz ce que nous avons dit de là pomme de terre : c’est du pain tout fait ! Le froment et le seigle, cuits en grain, formeraient une mauvaise nourriture. Le meilleur moyen d’utiliser pour la nourriture de l’homme le froment et le seigle, de les rendre agréables au goût, a été de les réduire en farine, puis en pain à l’aide d’une fermentation particulière dont le gluten qu’ils contiennent les rend susceptibles ; mais la pomme de terre, mais le riz forment, par le fait seul de la cuisson, une excellente nourriture, sans exiger de manipulation, sans transformation en pâte ; il n’y a pas même pour le riz comme pour la pomme de terre la raison spécieuse de l’économie des frais de transport. Pourquoi donc s’efforcer de changer l’indication donnée par la nature, sans qu’il en résulte aucun bien pour l’humanité ?

Dans ces derniers temps (1835), M. Arnal, médecin à Paris, a beaucoup insisté pour que l’Académie de médecine reconnût et proclamât l’excellence d’un pain fait avec addition de 1/7 de riz. L’Académie goûta ce pain, le trouva bon, mais s’abstint de prononcer, et bien elle fit.

Voici quel est ou plutôt quel était le procédé de M. Arnal :

« Préparation du riz : 13 litres d’eau à l’ébullition ; répandre peu à peu la farine de riz (2 livres), en agitant bien le mélange jusqu’à ce qu’il forme bouillie et que celle-ci soit également visqueuse sur tous les points. Il faut, pour verser la farine de riz dans l’eau bouillante, prendre la précaution importante delà délayer préalablement dans une petite quantité d’eau froide.

« Pétrissage. On prend la moitié du riz un peu refroidi, jusqu’à ce que la température puisse être supportée par le pétrisseur ; on pétrit avec un levain de huit livres, pris chez lin boulanger, et on y incorpore peu à peu 6 livres de farine de froment, toujours en pétrissant ; on laisse reposer et lever cette pâte dans une corbeille.

« Lorsque le levain ci-dessus a suffisamment fermenté, au bout de 20 minutes à peu près, on verse dessus l’autre moitié du riz, qu’on a salé et mis refroidir. La pâte délayée, on y ajoute peu à peu 6 autres livres de farine de froment et on pétrit de nouveau ; enfin, on termine le pain comme par les procédés ordinaires.»

Voici le résultat d’un essai de la méthode ci-dessus :

13 livres d’eau, 2 livres de riz, 12 livres farine froment ont donné 20 livres 10 onces de pain cuit. On ne compte pas les 8 livres de levure qui ont été retirées.

Les résultats annoncés par M. Arnal dans les mêmes conditions étaient de 24 livres de pain.

On voit, par ce que nous venons de décrire, de quelles difficultés, dans la pratique, serait entourée cette préparation 1re de riz, et combien de mécomptes auraient eu lieu lorsque l’on eût été forcé de livrer ce travail à des garçons boulangers.

A l’appui de ce que nous avons dit sur la panification du riz et de la pomme de terre, nous citerons l’autorité compétente de M. Raspail. Dans un de ses ouvrages il s’exprime ainsi :

« Il ne faut pas dire : Le pain fait avec du riz sera plus ou moins nutritif, parce que le riz suffit ou ne suffit pas à la nourriture de certaines peuplades ; mais seulement il faudra demander à l’expérience de l’alimentation les moyens de décider que, dans telle localité, telle substance est plus alimentaire qu’une autre.

« Ce n’est pas le rendement, c’est-à-dire l’augmentation de poids qui peut permettre de préjuger la question ; car l’augmentation de poids est due à la partie aqueuse, et l’eau absorbée pendant le repas est tout aussi bonne pour l’alimentation que le surcroît de l’eau absorbée par la pâte. Il faut de l’eau pour favoriser la fermentation 1re ; mais une fois que la fermentation s’établit, avec une quantité d’eau donnée, le surplus n’ajoute qu’un poids absolument inerte à la masse.

« On a fait beaucoup d’expériences sur la panification depuis 60 ans ; mais on a toujours désespéré d’associer avec succès à la farine de froment le riz et la fécule de pommes de terre. Nous ne saurions blâmer les efforts que font les simples particuliers pour arriver à un résultat, car leurs succès ne pourraient que profiler aux consommateurs ; mais nous préférerions apprendre que l’esprit des observations se porte plutôt vers l’art d’augmenter la production des substances alimentaires de 1re qualité que vers les moyens d’en diminuer la consommation en les associant à des substances d’une qualité inférieure. »

On a cherché à différentes reprises à panifier la farine de haricots, de pois, et c’est toujours dans les momens de grande cherté que ces essais ont été tentés ; mais ils ont en général, plutôt pour but des gains particuliers que le profit de l’humanité. Les haricots surtout ont donné de si mauvais résultats que plus d’une fois l’autorité a été obligée de faire saisir et de détruire les farines qui avaient ainsi été falsifiées.

Section XVII. — De l’introduction dans le pain de substances nuisibles à la santé.

Tout ce que nous allons dire sur l’adultéra-