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CONSERVATION DU BEURRE.


lorsque le lait forme ainsi une masse bien homogène que l’on procède au barattage en versant sur le lait de l’eau chauffée à 18° ou 20° dont la quantité varie suivant les saisons.

Battre la crême bouillie. Dans les comtés anglais de Somerset, Cornwall et Devon, dit Marshall, le lait, 24 heures après la mulsion, est mis dans des vases plats qu’on pose sur un feu doux, mais assez fort pour que le liquide approche de l’ébullition en 2 heures et pas moins. Une personne le surveille, et au moment où une bulle ou un bouillon se manifeste, on l’enlève du feu et on le laisse reposer 24 heures. Au bout de ce temps, si la quantité de lait est considérable, la crême a un pouce ou plus d’épaisseur. On la tranche avec un couteau et on l’enlève. Le lait, après cette opération, ne contient plus guère que du fromage et du sérum. Les fermières assurent que par cette méthode on obtient un quart de beurre de plus, et que quelques coups dans la baratte donnent un excellent produit.

§ IX. — Beurre de petit-lait.

Ce beurre, qu’on fait surtout dans les pays on se fabriquent les fromages, est celui qu’on retire du petit-lait qui découle spontanément du caillé, ou qu’on obtient par la pression du fromage. Il est toujours inférieur en qualité à celui fait avec la crême de lait frais ou le lait et la crême battus ensemble.

Il y a 2 espèces de petit-lait, le vert et le blanc. Le 1er  s’échappe naturellement du caillé ; le second est celui qu’on obtient par la pression.

Il y a plusieurs méthodes pour obtenir le beurre du petit-lait. Dans certaines laiteries tout le petit-lait qu’on retire des fromages est mis dans des vases pendant un, deux, ou plusieurs jours ; après quoi on l’écrême, et ce qui reste est donné aux veaux ou aux cochons. On fait bouillir dans une bassine ou un chaudron la crême qu’on a levée, puis on la met dans des pots ou elle reste jusqu’à ce qu’on en ait assez pour la battre, opération qui dans une laiterie importante doit être faite au moins 1 à 2 fois par semaine.

Une autre méthode plus en usage consiste à mettre le petit-lait vert sur le feu, dans un chaudron, aussitôt qu’on l’a recueilli des baquets à fromage. Quand il est bouillant on y verse de l’eau froide ou du petit-lait blanc, ce qui fait monter une écume blanche, crêmeuse et épaisse, que la fille enlève à mesure qu’elle se forme et qu’elle met dans des terrines où elle reste jusqu’à ce que cette crême soit battue.

Le petit-lait blanc, au moins celui qui n’est pas employé à faire monter la crême du petit-lait vert bouillant, est mis dans des terrines comme du lait ordinaire pour que la crême monte. Quand on lève cette crême on la joint à celle qui provient de l’ébullition et on les bat ensemble. Les Hollandais battent quelquefois la totalité du petit lait-vert et blanc pour en retirer le beurre qui n’exige pas plus d’une heure de battage.

Les vachers du Cantal mêlent au petit-lait qui s’écoule du fromage 1/12 de lait frais, laissent reposer le tout dans des vases de bois, et au bout de quelques jours enlèvent une crême dont ils font un beurre blanc d’assez bon goût. Salé et conservé à la cave dans des feuilles de gentiane, il devient rouge orange et d’un goût âcre et piquant.

§ X. — Conservation du beurre.

I. Beurre frais. — Le beurre récent doit être conservé dans un lieu très-frais, ou tenu dans un vase placé dans de l’eau fraîche qu’on renouvelle plusieurs fois par jour, ou enveloppé dans un linge blanc de lessive, qu’on tient toujours humide. Mais, quelles que soient les précautions qu’on prenne, il ne tarde pas, surtout quand il fait chaud, à s’altérer au contact de l’air, et à devenir rance. Les ménagères ne manquent pas de recettes pour lui rendre sa fraîcheur ; mais c’est en vain qu’on le lave à l’eau pure, avec du lait frais ou de l’eau-de-vie, etc., on ne lui enlève pas entièrement son mauvais goût. La fabrication du beurre n’étant pas égale dans toutes les saisons, il faut donc, pour le préserver de toute altération, et surtout si on veut le transporter au loin, employer des moyens de conservation qui consistent à le saler ou à le fondre. C’est de préférence en automne qu’on s’occupe de cette opération.

II. Beurre salé. — Le choix d’un sel propre à saler le beurre n’est pas indifférent ; on ne doit employer que celui qui, par une longue exposition à l’air, a perdu tous ses sels déliquescens, ou qui attire peu l’humidité et n’a plus ni âcreté ni amertume. La bonne conservation du beurre avec ses qualités dépend de la manière dont il a été salé.

Dans le pays de Bray, le beurre, après avoir été soigneusement lavé, est étendu en couches minces sur une grande table très-propre et humide, et on répand dessus, pour chaque 1/2 kilog. (1 liv.) de beurre, 30 gram. (1 once) de sel desséché au four et broyé dans un mortier de pierre ou de bois, et on pétrit le tout avec les mains ou mieux avec un rouleau de bois jusqu’à ce que le sel et le beurre soient bien incorporés. On emploie le sel gris de préférence au blanc. Dans d’autres localités on commence par laver de nouveau le beurre à l’eau fraîche, puis dans une forte saumure dans laquelle on le laisse environ une semaine à la température la plus froide possible et sous forme de petits pains de la largeur et l’épaisseur de la main. Ensuite on le repétrit, on le reforme en pains qu’on place dans des vases de bois ou de terre, en saupoudrant leurs intervalles d’une quantité variable de sel.

Dans le Holstein et en Angleterre on pense qu’il ne faut pas trop fatiguer le beurre par le pétrissage avant la salaison, et que plus il est salé frais à une température qui ne dépasse pas 10°, plus il conservera son goût agréable et sera facile à garder et à transporter au loin. Le sel qu’on répand alors dessus est réduit en poudre fine, et la masse est travaillée avec soin pour y répartir le sel bien également. On choisit aussi bien qu’en Hollande, un sel pur, blanc et de la meilleure qualité.

Quant à la quantité de sel qu’on ajoute au beurre, elle varie suivant la qualité de celui-ci et la pureté du sel. Plus le beurre est de