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chap. ier
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TRAVAUX DE LA LAITERIE A LAIT.


On parvient à sécher promptement la laiterie en la frottant partout avec des éponges fortement exprimées, puis avec des linges blancs et secs, et en établissant, aussitôt après, un courant d’air assez vif qui achève d’enlever les dernières particules aqueuses.

3o Le lavage de tous les ustensiles doit se faire non pas dans la laiterie, comme on le pratique quelquefois, mais dans le lavoir contigu qui est destiné à cet usage. Tout vase ou ustensile qui a servi à contenir, passer ou filtrer du lait, de la crème ou du petit-lait, doit être soumis à un lavage. Ce lavage se donne à l’eau bouillante, qui est toujours sur le feu à cet effet, et en frottant les objets partout avec des brosses ou de petits balais, puis avec un gros linge. Cette opération ayant été faite soigneusement, on les rince à l’eau pure et froide, on les fait égoutter, on les essuie avec un linge sec et très-propre, puis on les expose au soleil, à l’air ou sur des planches bien aérées pour les sécher complètement et afin qu’il ne s’y forme pas de moisissure. Enfin, quand ils sont très-secs, on les range sur des planches où on les trouve facilement quand on en a besoin. Dans les temps humides, brumeux et froids, où l’air ne suffirait pas pour les sécher, on procède à cette opération en les plaçant devant le feu. Tous les vases qui ont contenu du lait, après un temps plus ou moins long de service, ou dans lesquels il se serait aigri ou gâté, doivent être préalablement échaudés avec une lessive bouillante de cendres, ou bien de potasse ou de soude faible, frottés partout dans cette lessive avec la brosse et le goupillon, soumis de rechef à cet échaudage s’ils ne sont pas bien nets et conservent encore une saveur ou une odeur aigre et acide, et enfin passés à l’eau bouillante, rincés à l’eau froide et séchés de la manière indiquée ci-dessus.

4o Ecarter du voisinage de la laiterie tout ce qui pourrait corrompre l’air, tel que fumiers, urines, mares, eaux ménagères, immondices, etc. ; — établir ou chasser au loin tous les travaux ou tous les objets qui occasionnent de la fumée, de la poussière, ou soulèvent et agitent un air chargé de principes fermentescibles, sont autant de conditions utiles à remplir.

5o Il ne faut rien introduire de malpropre dans l’intérieur de la laiterie. Ainsi on éloignera tous les animaux quelconques. On aura soin de ne pas apporter avec les pieds, quand y on entrera, de la boue, de la poussière, des fientes. Le mieux, pour éviter cet inconvénient, est d’imiter les bonnes ménagères du pays de Bray, qui n’entrent jamais dans la laiterie qu’avec des sabots de bois qui restent toujours à la porte, et qu’on chausse après s’être préalablement dépouillé de sa chaussure ordinaire. On doit, en outre, avoir l’attention de ne pas manger ou fumer dans la laiterie ; — de ne pas y apporter de substances odorantes ou fermentescibles, qui donneraient un mauvais goût au lait ou le corrompraient ; — de ne pas y entrer la nuit avec des lampes, des torches ou autres lumières qui chargent l’atmosphère d’une fumée épaisse et puante, etc.

6o On entrera le moins possible dans la laiterie, et seulement lorsque cela sera rigoureusement nécessaire. Pour tous les travaux, il vaut mieux, en été, n’y entrer que le matin ou le soir, et en hiver vers le milieu du jour, parce que c’est l’époque de la journée, dans ces saisons, où l’air extérieur s’éloigne le moins de la température moyenne.

7o On ne doit rester que le temps nécessaire aux opérations, parce que la présence prolongée d’un être vivant dans la laiterie en élève la température ; — que l’agitation produite par le mouvement nuit à la bonne séparation de la crème ; — et que la transpiration et la respiration y versent des miasmes qui altèrent la pureté de l’air.

8o Faire toutes les manipulations au dehors est une règle dont on s’est bien trouvé dans plusieurs localités, mais qui peut néanmoins entraîner à plusieurs inconvéniens assez graves. Dans tous les cas, si on aime mieux faire tous les travaux à l’intérieur, il faut se hâter, dès qu’ils sont achevés, d’enlever tous les vases ou ustensiles qui ont servi, ou ceux qui ne doivent plus y rester, et exécuter les lavages convenables.

9o Il faut nettoyer à fond une fois par an, ou plus souvent, si cela est nécessaire ; c’est-à-dire qu’il faut une fois chaque année faire gratter, laver, réparer et recrépir les murs, et les blanchir à la chaux dans toute leur étendue.

10o On opérera des fumigations ou l’assainissement quand la laiterie aura contracte un goût aigre et de moisi que les lavages ordinaires ne peuvent enlever, et lorsque la crème ou le lait manifestent promptement des taches de moisissure. Dans ce cas, il faut vider tous les vases, asperger de l’eau partout, boucher toutes les ouvertures, et faire brûler au milieu de la laiterie, dans un plat de terre, quelques poignées de fleur de soufre. On ouvre ensuite toutes les issues pour opérer une ventilation, et on lave partout à plusieurs reprises. On peut encore nettoyer tous les ustensiles en bois et la laiterie entière avec de l’eau de Javelle, ou de l’eau dans laquelle on a délayé du chlorure de chaux (ces substances se trouvent à bas prix chez tous les pharmaciens) ; après cette opération, il faut laver plusieurs fois à grande eau, ventiler, et n’introduire de nouveau lait dans la laiterie que lorsque toute odeur d’eau de Javelle ou de chlorure aura complètement disparu.

§ VI. — Travaux de la laiterie.

Toute l’économie d’une laiterie consiste à la diriger avec la plus parfaite régularité, à faire chaque chose au moment convenable, sans en hâter ou en différer l’exécution, ce qui, dans les deux cas, nuit à la qualité des produits. Tout dépend de l’exactitude, de l’activité, de l’habileté et de la propreté de la personne chargée de sa direction. Ses occupations, ses soins, sa vigilance commencent et ne doivent finir qu’avec le jour. Les soins généraux à donner à une laiterie ont été expliqués avec assez de détails pour que nous n’ayons plus à y revenir ; ce sont donc les manipulations qu’on fait subir au lait aussitôt après son extraction des mamelles de la vache, qui vont seules nous occuper