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liv. iv.
Arts agricoles : éducation des abeilles.


vent le corps de la ruche pour placer dessous un autre corps ; ils garnissent les points de contact des 2 corps avec du pourget (mélange de chaux, de bouse de vache, d’argile et d’un peu d’eau), et s’il y a une entrée au corps supérieur, ils la bouchent. Ils peuvent également faire cette opération sur quelques ruches avant le commencement de la ponte, lorsqu’ils désirent augmenter la récolte et diminuer la production des essaims. Dans ce dernier cas ils laissent le couvercle.

[8.2.3.6]

§ VI. — Essaimage.

[8.2.3.6.1]

I. — Essaims naturels.

Pendant la saison dont nous venons de parler, la multiplication des abeilles est considérable ; aussi un bruit sourd se fait-il entendre, et il augmente chaque jour d’intensité. Bientôt on voit sortir de quelques ruches, de 11 heures à 3 heures, des mâles ou faux bourdons ; c’est un indice que la mère a pondu depuis 8 à 10 jours dans les alvéoles de reine, et qu’il sortira avant peu un essaim. On dispose en conséquence des ruches qu’on nettoie bien et qu’on parfume en les frottant avec des plantes aromatiques ou avec l’extrémité de tiges fleuries. On prépare également un sac dans lequel on fixe deux cerceaux pour en écarter les parois, et placés assez loin de l’ouverture pour qu’on puisse le fermer à volonté ; 2 grands balais ou une petite pompe à main comme celle des jardiniers, un seau plein d’eau, 1 fumeron ou 2, une ou 2 longues perches terminées par un crochet à l’extrémité supérieure, un plumasseau et à défaut une petite branche à feuilles souples, une branche d’un pied et demi dont la tête, de 6 à 10 pouces de long, est taillée en boule alongée, un plateau, un couvercle de ruche, un ou 2 paillassons de jardinier ou un ou 2 grands torchons, un camail et du sable fin, enfin un peu de miel pour en délayer au besoin avec de l’eau.

Tout cet attirail disposé, on place quelques-unes des ruches sur des plateaux, ou on les suspend à des arbres autour du rucher. On peut même en mettre dans les places des ruchers qui sont vides. Alors il ne reste plus qu’à faire une garde exacte pour épier la sortie des essaims qui peut avoir lieu depuis 10 heures du matin jusqu’à 3 heures du soir dans les temps ordinaires, mais qui peut commencer depuis 9 heures jusqu’à 4 par de fortes chaleurs.

On laisse l’essaim sortir tranquillement et se balancer dans l’air ; ce n’est que lorsqu’il prend une direction contraire à celle qu’on désire, qu’on s’empresse de lui lancer du sable et de l’eau et qu’on fait beaucoup de bruit, non seulement pour empêcher les ouvrières d’entendre et de suivre leurs conducteurs, mais encore pour prévenir les voisins qu’il est sorti un essaim. Le bruit, l’eau, le sable sont un orage pour l’essaim qui s’arrête et se place, soit contre une branche d’arbre, soit contre un mur, et quelquefois se pose à terre. On garantit les abeilles des rayons du soleil, s’il est possible, pendant qu’elles se groupent en formant une boule ou une grappe de raisin.

Lorsqu’une grande partie des ouvrières est réunie, si elles sont à terre, on pose une ruche dessus, en la soulevant d’un côté de deux pouces pour l’entrée des abeilles, et on intercepte les rayons solaires qui donnent sur la ruche. On accélère l’entrée des ouvrières avec de la fumée ou le plumasseau, et dès qu’on voit des abeilles se placer à l’entrée de la ruche et y battre des ailes pour rappeler celles qui sont dehors, on les laisse tranquilles jusqu’à ce que le calme soit rétabli dans l’essaim.

Si les abeilles se groupent contre une branche qu’on puisse secouer, on place la ruche, l’ouverture en haut, le plus près possible de l’essaim, et on donne à la branche une ou deux secousses promptes pour en détacher l’essaim qui tombe dans la ruche. S’il reste encore beaucoup de mouches contre la branche, on les fait tomber avec le plumasseau. On pose ensuite la ruche auprès de l’arbre sur un plateau, un paillasson ou une toile, en la retournant bien doucement, ce qui n’empêche pas la plupart des abeilles de rouler et de sortir de la ruche, dont elles ont bientôt couvert les parois extérieures. On agit comme ci-dessus pour les faire rentrer, mais si la mère est retournée sur la branche, bientôt des ouvrières y retournent et y forment un groupe autour d’elle. On les ramasse comme auparavant, mais dans le couvercle, dont on fait tomber les abeilles, soit dans la ruche qu’on a retournée, soit sur le plateau après avoir seulement penché la ruche en arrière. Dès que des ouvrières sonnent le rappel, l’opération est terminée, et on se contente de faire de la fumée sous la branche pour chasser les ouvrières qui y reviennent, et si elles s’obstinent à y revenir, on frotte la branche avec de la chélidoine, de la camomille puante ou de l’éclair, dont l’odeur les chasse.

Lorsque la branche est trop grosse pour être secouée, on oblige les abeilles à se bien réunir, soit avec la fumée ou avec le plumasseau, et en passant les barbes d’une forte plume entre l’essaim et la branche, on les fait tomber dans la ruche. Quand l’essaim s’est placé entre deux ou trois branches et qu’on peut poser dessus la ruche qu’on a aspergée d’eau miellée, on y fait entrer l’essaim ; mais si on ne peut faire usage de la ruche, ce qui a lieu surtout lorsque l’essaim s’est niché dans un trou d’arbre ou de mur, alors, après avoir trempé l’extrémité ou branchage de la grande branche dans l’eau miellée, on la pose sur le trou, on l’y enfonce et on la tourne bien doucement, et quand une grande partie des abeilles s’y est attachée, on les secoue dans la ruche.

Les essaims, et principalement les essaims secondaires, s’écartent quelquefois du rucher. Le sac est alors plus commode pour les rapporter, parce qu’après les y avoir fait entrer on le ferme pour rapporter l’essaim, et si on a été obligé d’employer la branche miellée pour le recueillir, on la place dans le sac dans lequel on la suspend, avec l’attention, en nouant celui-ci pour le fermer, d’en laisser sortir quelques pouces.

Si les abeilles qui sont placées sur une branche la quittent pour retourner à la ruche mère, ou si, entrées dans la ruche, elles n’y