Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, III.djvu/167

Cette page n’a pas encore été corrigée

PRÉPARATIONS DE LA SOIE 153 guidesougriffesenfildeferouenverre,autravers desquels passe la soie avant de s’enrouler sur l’asple. — On voit aisément ainsi comment la roue K, par ses révolutions, tire et pousse successivement la bielle P, puis le bras O, imprime à l’autre bras M ce va-et-vient, ou mieux ce mouvement alternatif en arc de cercle qui sert à distribuer le fil sur l’asple, et ne lui permet de se coucher sur lui-même qu’après le nombre établi de révolutions. Dans l’ancien tour de Piémont, la fileuse, après avoir assemblé ses fils, et les avoir passés à travers les filières placées au-dessus de la chaudière, les rou- lait entre le pouce et l’index pour leur donner la croisure, les séparait ensuite, les passait à travers les guides du va-et-vient et les livrait à la tourneuse qui les attachait aux lames de l’asple et mettait aussitôt ce dernier en action. Cette disposition présentait des inconvénients : elle laissait à la discrétion des ouvrières le nombre de tours à donner à la croisure, et ne pouvait mettre à l’abri de leur négligence sur ce point. La croisure donnée aux fils dans un seul sens ne faisait frotter l’un contre l’autre que la moitié de leur surface, ce qui ne leur donnait pas le degré de pureté et d’éclat des soies bien tirées. Pour remédier à ces inconvénients, vauganson imagina la double croisure, qui a été perfectionnée depuis par d’autres mécaniciens, et qui offre l’avan- tage aujourd’hui de former deux croisures, dont l’une est en sens inverse de l’autre, et de fixer inva- riablement le nombre de tours de cette croisure, sans qu’il soit à la liberté de la fileuse de croiser plus ou moins. Voici la construction de la croisade per- fectionnée, telle qu’elle est employée dans les atel- iers français. Sur le devant du tour est placée cette croisade qu’onvoitencoupedanslafig.149,pardessusdans lafig.150,etdefacepar-devantdanslafig.152. Elle se compose de 2 montants verticaux et égaux Fig. 152. NNquisupportentunchâssisquadrangulaireRR. Ces montants ont, sur leur face intérieure, une rainure profonde dans laquelle peut tourner, mon- ter ou descendre librement, mais sans ballotter, une lunette à gorge S S, qui porte 2 guides implantés sur sa circonférence intérieure. Cette lunette est sus- pendue à une corde sans fin croisée T, qui passe sur une poulie U, laquelle a le même diamètre que la lunette et est traversée par un arbre reposant sur des coussinets fixés sur le châssis R. Sur chacune des faces de cette poulie est attachée une corde V tendue par des poids, et dont l’une est enroulée aut- our de l’arbre quand l’autre pend de toute sa lon- gueur. On conçoit qu’en tirant la corde enroulée on fait tourner la poulie, et par suite la lunette, d’un nombre de révolutions égal aux enroulements que la corde faisait sur l’arbre ; en même temps, la corde pendante, qui était restée jusqu’ici dévelop- pée, s’enroule à son tour sur cet arbre d’un nombre de tours égal à celui dont l’autre se déroule, mais en sens contraire. On voit ainsi que si les 2 fils de soie, en sortant de la bassine et des barbins Z Z placés au-dessus, sont passés successivement à travers les filières de la lunette, puis des griffes du va-et-vient, et qu’on déroule ensuite en la tirant une des cordes de la croisade, ces fils vont se croiser en avant et en arrière de la lunette et en sens contraire, d’un nom- bre de tours identiquement égal à celui que la corde aura fait faire à la poulie U, et pour que le mécan- isme soit entièrement à l’abri de la négligence de l’ouvrière, ce mouvement de déroulement, une fois commencé, continue seul au moyen de contre- poids, jusqu’à ce que la corde tirée soit entièrement développée. Le nombre des enroulements de la corde dépend de celui des tours qu’on veut donner à la croisure. Mais quel que soit ce nombre, il est trèsfacile,quandunbrindesoiecasse,quandilse formeunmariage,etc.,d’yporterremède.Onn’a qu’à tirer la corde enroulée pour défaire la croisure, à renouer ou rétablir les bouts défectueux, reformer la croisure en tirant la seconde corde et continuer le travail avec une perte très légère de temps et peu de déchets. § ii. — Du moulinage des soies. 1° Des moulins. Les soies, après avoir été tirées, reçoivent avant d’être tissées diverses préparations qui sont plutôt du domaine des fabriques et des manufactures, mais qu’il est important pour l’éducateur de vers à soie de connaître. La 1re de ces opérations est le dévidage qui a pour but de transporter, sur de petits guindres ou sur des bobines, les fils enroulés sur les asples, ce qui se fait à la main au moyen d’un rouet ou par le secours de machines qui, en dévidant un grand nombre de fils à la fois, accélèrent le travail. La 2e opération à laquelle on soumet la plus grande partie des soies est celle du moulinage propre- ment dit, et qui consiste à faire éprouver aux fils un

154 ARTS AGRICOLES : ÉDUCATION DES VERS À SOIE LIV. IV. certain degré de torsion, afin de leur donner la force nécessaire pour résister au travail du tissage. Cette torsion se donne le plus généralement au