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on la plonge ; puis, après l’avoir laissée se ressuyer, à la plonger dans du vinaigre affaibli bouillant ; et ensuite à la laisser sécher à l’air sans autre précaution. Il paraît que par ce moyen on conserve surtout parfaitement les parties grasses des viandes, qui restent blanches et sans altération. Une des plus grandes difficultés qu’ont rencontrées jusqu’ici ceux qui ont préparé des viandes pour les marins, a été de préserver ces substances desséchées de la moisissure et de la piqûre des insectes. M. derosne à cette occasion s’est livré à quelques essais qui lui ont permis de remédier facilement à cet inconvénient en renfermant les viandes sèches dans un milieu qui ne permettrait pas aux larves des insectes de vivre, et qui absorberait lui-même l’humidité qui pourrait se trouver dans le peu d’air existant lors de la fermeture des boîtes de métal ou de bois bien sec et verni à l’intérieur, dans lesquelles on renfermerait ces viandes, ou même celle qui pourrait encore être renfermée dans ces viandes incomplètement desséchées. Le corps ou milieu dont il a fait choix et qu’on avait déjà maintes fois appliqué à cet usage, est le charbon très divisé, soit pur, soit combiné avec des substances terreuses, tel qu’on le trouve dans le noir animal ordinaire, dans les noirs schisteux de Menat et dans les noirs terreux faits artificiellement. Les expériences ont été faites avec du noir schisteux de Menat, qui, par ses propriétés absorbantes, paraît plus propre à cet objet que le noir animal ou le charbon végétal réduits en poudre. Des viandes ont été complètement séchées sans l’emploi de la chaleur, en les mettant simplement en contact avec du noir de Menat très sec et réduit en poudre impalpable. On s’est borné à renouveler les couches charbonneuses au fur et à mesure que dans les 1ers jours elles se trouvaient saturées d’humidité. Par ce procédé simple on a amené facilement à l’état complètement sec des viandes qui contenaient à l’état naturel 62 à 63 p. % d’humidité, et on les a rendues aussi sonores que du bois. Conservées dans cette même poudre de charbon, ces viandes au bout de 18 mois n’offraient pas la moindre trace de moisissure ou de piqûre de vers, et elles ont fourni par décoction dans l’eau un bouillon d’une saveur agréable, mais participant de la saveur du bouillon fait avec le petit salé ou la viande rôtie. Il est constant, d’après les efforts qui ont été faits jusqu’ici, que l’on peut parvenir à conserver les viandes sans le secours de la salaison et du boucanage, en les faisant dessécher par divers moyens, mais qu’il est très difficile de conserver à la chair desséchée une proportion d’eau telle et tellement répartie que l’on puisse en obtenir des mets aussi agréables et aussi tendres qu’avant la dessiccation. Toutefois, notre savant collaborateur, M. payen, a pensé qu’il était possible de procurer, avec de la viande sèche, aux gens des campagnes, aux soldats et aux marins, du bouillon de viande avec la saveur toute spéciale qui le rend si agréable au goût, ainsi qu’avec toutes ses autres propriétés utiles. Voici les expériences sur lesquelles sont fondées ces prévisions, et qui pourraient mettre sur la voie pour la découverte d’un procédé usuel et pratique. Si l’on soumet la chair musculaire d’un animal récemment abattu à une élévation brusque de température, au moyen d’un corps qui, comme l’eau, a une grande capacité pour la chaleur, on fait gonfler et rompre un très grand nombre de cellules qui contiennent les sucs de la viande : celle-ci peut alors laisser écouler, sous l’influence d’une forte pression, plus des 8/10 du liquide qu’elle renferme. Si l’on fait alors dessécher ces sucs par un courant d’air chauffé de 50 à 60 degrés, puis qu’on renferme le produit dans des flacons bien secs, on les conservera pendant plusieurs années sans craindre les variations atmosphériques. Comme la température, pendant la préparation de ces sucs, n’aura pas été élevée au point de développer ni d’enlever le principe aromatique, celui-ci se produira lorsqu’on dissoudra et fera chauffer à 100 degrés la substance sèche conservée. Un à 2 centièmes suffiront pour donner à l’eau la saveur et les qualités du bouillon. Le résidu de chair musculaire pressé sera desséché avec la plus grande facilité dans une étuve à courant d’air chaud, et donnera de son côté, employé en quantité suffisante, un bouillon fort agréable ; mais la viande cuite ainsi aura conservé trop de cohésion et perdu trop de sucs sapides pour être aussi tendre et d’un goût aussi agréable que le bouilli ordinaire. Il ne nous reste plus qu’à parler du procédé de M.apperT, appliqué à la conservation des substances animales, et dont plusieurs années d’expériences et d’essais ont suffisamment constaté l’efficacité. Tout le monde connaît ce procédé, qui consiste : 1° à renfermer dans des bouteilles ou bocaux, et dans des boîtes de fer-blanc ou de fer battu, les substances que l’on veut conserver; 2° à boucher ou souder ces différents vases avec la plus grande précision, opération d’où dépend surtout le succès ; 3° à soumettre ces substances,

120 ARTS AGRICOLES : ÉDUCATION DES VERS À SOIE LIV. IV. ainsi renfermées, à l’action de l’eau bouillante d’un bain-marie, pendant plus ou moins de temps, selon leur nature ; 4° à retirer les bouteilles ou boîes du bain-marie au temps prescrit pour chacune des substances. Nous ne pouvons entrer ici dans les détails sur la nature des bouteilles et des bocaux, sur les bouchons, le bouchage, le ficelage, le lut et la confection des boîtes ; ni sur la construction du bain-marie et la manière de l’appliquer aux bouteilles ou boîtes qui renferment les diverses substances alimentaires ; nous renvoyons, pour avoir des renseignements étendus sur cette matière, à l’ouvrage que M. apperT a publié lui-même sous ce litre : Le livre de tous les ménages, ou l’art de conserver pendant plusieurs années toutes les substances animales et végétales, en regrettant seulement que ce procédé ingénieux, pratiqué un peu en grand, ne soit pas d’une exécution plus facile et d’une application plus économique. F. M.

CHAPITRE VII. — éduCaTion des vers à soie.

seCTion ire. —