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apprêtent jusqu’à 24 bœufs par jour. Voici quelle est la division du travail. Les moitiés de bœuf sont présentées aux balances aa(fig.106);lemaîtredelaboucherieIdéclareà haute voix leur poids, qui est enregistré à l’instant par l’agent du fournisseur 2 et par celui du com- missaire 3 ; elles sont ensuite portées en B B, où des bouchers 4, 4 détachent l’épaule et pratiquent, depuis l’os de la hanche jusqu’en bas, trois sections qui partagent le demi-bœuf en 4 bandes longitudi- nales. Celles-ci, poussées au point C C, y sont subdi- visées par les bouchers 5 5 en morceaux de 8 livres qu’on jette, au fur et à mesure, dans des paniers d d destinés à en recevoir chacun une dizaine seule- ment. Les hommes 6, 6 dont l’office est de trans- porter ces paniers, doivent, chaque fois qu’ils s’en saisissent, crier la quantité de morceaux qu’ils enlèvent. Lorsqu’on finit de débiter un demi-bœuf, si le nombre des pièces qu’il a produites s’éloigne de 42, qui est celui que doit contenir chaque baril ou tierçon, la différence est annoncée à l’agent du com- missaire, qui l’inscrit et le répète à haute voix. Les paniers sont portés à des hommes 7, 7, 7 qui salent la viande et bordent une table portative E F placée devant les caisses carrées G. Ils ont les mains garnies de gants de grosse flanelle, et, prenant à poignée le sel commun, ils en frottent fortement les pièces de bœuf une à une et sur toutes les faces. Chaque homme peut frotter une pièce par minute, ce qui produit, dans une journée de 8 heures de travail, 480 pièces ou 3 840 livres, qui équivalent à environ 15 demi-bœufs. Les caisses carrées G G qui environnent l’atelier sont assez vastes pour contenir 8 bœufs. Leur fond, placé au-dessus d’un réservoir, est percé d’un grand nombre de trous, excepté toutefois à l’endroit H H, où se tient l’ouvrier 8 exclusivement chargé de l’ar- rimage. Cet homme dispose artistement les pièces de bœuf autour de lui de façon à s’en former un rempart demi-circulaire. Quand il se retire il laisse, au point qu’il occupait, une espèce de puits où la saumure s’épanche et où elle est prise 1 ou 2 fois par semaine pour être versée sur la viande. Le bœuf, ainsi arrangé, reste en repos pendant 7 jours ; les soins se bornent à l’arroser une ou deux fois de la saumure qui s’est amassée dans le puits. Au bout de la semaine on le transporte dans la caisse adja- cente, en plaçant au fond les couches superficielles, et réciproquement. Une seconde période de 7 jours suffit alors pour le rendre propre à être mis dans les barils où se complète le système qui doit assurer sa conservation. De la même manière qu’en Irlande, on se sert en Angleterre de 2 qualités de sels, qui sont blanches et en cristaux, et provenant toutes deux des marais salants. L’un est celui qu’on nomme sel commun, qui sert particulièrement à frotter la viande, et contient une petite quantité de matière terreuse et le dou- ble de sulfate de chaux et de manésie de l’autre sel. Celui-ci, qui est nommé bay-salt ou sel de baie, parce qu’on le recueille dans la baie de Vigo en Galice, est beaucoup plus pur, en gros cristaux, et très sec ; ce qui le rend propre à être interposé entre les couches de salaisons. Ce sel persiste à l’état cristallin pen- dant plusieurs années, et on le considère comme l’agentconservateurleplusefficace.Aulieudele pulvériser on le brise en petits fragments, et on y ajoute une certaine portion de salpêtre ou sel de nitre dans la proportion de 10 onces pour 42 pièces ou 336 livres de bœuf que doit contenir chaque baril. Au bout de la seconde période de 7 jours, la viande est propre à être mise dans les barils ; à cette époque, on a consommé en général une livre de sel commun par pièce de bœuf, dont on présume que 2/3 restent adhérents à la viande, ou combinés avec elle, tandis que l’autre tiers s’est écoulé en saumure. C’est alors qu’on brise en petits fragments le bay- salt, et qu’on y ajoute la proportion voulue de nitre. On forme, pendant l’embarillage, 3 couches de ce sel, d’environ 8 lignes d’epaisseur l’une au fond du baril, l’autre au milieu, et la 3e sous le couver- cle. Quand on a ainsi couvert le fond d’un tierçon ou baril cerclé alternativement en fer ou en feuil- lards, d’une couche ou mélange de sel et de nitre, deux hommes y placent successivement les pièces de bœuf, de manière à ne laisser entre elles aucun intervalle ; dès qu’ils ont déposé ainsi 2 couches, ils les condensent en les frappant avec une masse qui pèse 25 livres, pour ne laisser aucun espace vide. Les ouvriers continuent leur travail jusqu’à ce qu’ils

CHAP.6e DE LA SALAISON DES VIANDES 113 atteignent le milieu de la barrique ; là une nou- velle couche de sel et de nitre est étendue et forme une barrière capable d’empêcher l’altération d’une moitié de la salaison de se propager à l’autre moitié. On achève de combler le baril en se servant toujo- urs de la masse. Quand on est arrivé à la place que le couvercle occupera, on verse sur la viande une forte saumure, et on étale enfin la 3e couche de sel et de nitre, et le baril est fermé, puis emmagasiné dans un lieu frais. Le porc, dont la chair résiste mieux que celle du bœuf à l’action du sel marin, s’apprête suivant le même procédé que le bœuf ; seulement on divise l’animal en pièces de 6 livres, qui entrent au nom- bre de 53 dans les tierçons. § iii. — Résumé des principes sur la salaison des viandes. L’art de préparer les salaisons n’a pas encore