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on les pèse, on marque dessus la qualité ou la classe, le poids brut et le tare, et on pratique sur un des côtés une petite ouverture qui sert à prendre des échantillons et à juger de la qualité renfermée dans chaque balle. F. M.

CHAPITRE VI. — ConservaTion des viandes.

La chair des animaux que l’homme fait naître, élève et abat ensuite pour en faire sa nourriture, ne peut guère être conservée au-delà de peu de jours, à la température moyenne de nos climats, sans éprouver un commencement de décomposition qui la rend insalubre et la fait rebuter comme aliment. Cependant, comme il est fréquemment impossible de se procurer chaque jour dans les campagnes de la viande fraîche, et qu’il importe toutefois, pour entre- tenir la santé et la vigueur nécessaires aux travaux des champs, de faire usage habituellement d’une nourriture animale, on a dû depuis longtemps s’oc- cuper des moyens de s’opposer à la décomposition des substances animales, et de les conserver, sinon dans leur fraîcheur primitive, au moins dans un état où elles pussent fournir encore un aliment agréable, sain et restaurant à toutes les époques de l’année. Aussi a-t-on fait usage, depuis les temps anciens, de divers procédés de conservation qui remplis- sent plus ou moins bien le but proposé. Néanmoins, comme la plupart de ces moyens sont généralement connus, et qu’il n’entre pas dans le cadre de cet ouvrage de donner ceux qui ne sont propres qu’à conserver les viandes pendant un petit nombre de jours et pour l’usage habituel des ménages, nous les passerons sous silence ; mais nous nous attacherons à décrire en détail ceux d’entre eux qui, pouvant faire l’objet d’une grande industrie, se rattachent très bien à l’agriculture, et qui sont en même temps les plus propres à conserver des viandes pendant un temps prolongé et sous toutes les latitudes du globe, soit pour la nourriture des agriculteurs, soit pour celle des armées en campagne, soit enfin pour ali- menter les marins dans leurs voyages lointains. Ces moyens se réduisent à peu près à la salaison des vian- des et à leur boucanage, qui sont les plus ancienne- ment connus, et qui donnent les résultats les plus constants et les plus sûrs. Nous ajouterons quelques autres procédés plus récents, mais qui, n’ayant pas pour la plupart été exploités avec l’étendue conven- able, n’ont pas encore reçu la sanction du temps. seCTion ire. — De la salaison des viandes. La salaison des viandes a pour but de les imprégner d’une certaine quantité de sel qui absorbe successivement les parties liquides à mesure qu’elles se séparent des chairs, pénètre celles-ci, s’y incor- pore, et les garantit par ses propriétés antiseptiques de toute altération ultérieure. Les viandes qu’on sale le plus communément pour les approvisionnements sont celles du porc et du bœuf ; néanmoins, celles de tous les animaux sont susceptibles de recevoir la même préparation et de se conserver par le même moyen. La salai- son de la chair de porc n’offre pas de difficultés ; celle de la viande de bœuf réclamant plus de soin, d’attention et de pratique, c’est particulièrement la préparation de cette dernière que nous allons décrire, en nous attachant de préférence à celle des viandes destinées aux approvisionnements de la marine, comme exigeant dans leur salaison la réunion de toutes les conditions qui assurent une bonne et longue conservation. Dans cette descrip- tion nous ferons surtout connaître les procédés usi- tés en Irlande et en Angleterre, pays où l’on prépare le mieux les salaisons. § ier. — Salaison des viandes en Irlande. Nous emprunterons la plupart des détails que nous allons donner sur le travail de la salaison des viandes en Irlande, au traité qu’a publié, en danois, M. C. marTFeLT, et qui a été traduit en français par M. Bruuneergaard. L’abattage des bœufs destinés aux salaisons en Irlande, commence au 1er septembre et dure jusqu’au 1er janvier ; mais le plus grand nombre est tué depuis le milieu d’octobre jusqu’au 15 novem- bre, parce que, pendant cette époque, l’animal est en meilleur état, et qu’il commence ensuite à dépérir à mesure que l’herbe devient rare. Le bœuf doit, dans les derniers six mois, avoir été engraissé sur un bon pâturage, être âgé de plus de 5 ans et n’en avoir pas plus de 7. On tue aussi des vaches grasses pour la salaison, et leur viande est vendue aux consom- mateurs qui recherchent le bon marché. Quand le bétail vient de loin et qu’il est échauffé, ou dans un état de fatigue et d’abattement, on le place dans un endroit très propre et bien aéré pour qu’il puisse, avant ; d’être tué, reprendre toute sa vigueur. On le laisse ainsi 3 jours pendant lesquels on ne lui donne que de l’eau. L’animal doit être tué et dépouillé proprement. Après qu’il a été abattu on le laisse refroidir pen- dant un jour. Pour les viandes destinées aux appro- visionnements de la marine et celles qui doivent composer la cargaison des navires du commerce, on retranche les parties saignantes du cou, et on dépèce ensuite l’animal en morceaux proportion-

110 ARTS AGRICOLES : CONSERVATION DES VIANDES LIV. IV. nés à la ration journalière des matelots. En général, aucun morceau ne doit avoir moins de 4 livres ni plus de 12. Les morceaux de poitrine, pour les car- gaisons, sont aussi grands qu’on peut les saler. On fait des incisions aux plus grosses pièces pour que le sel y pénètre mieux. Il faut prendre garde que les os longs dont le canal central est rempli de moelle n’entrent dans les barils avant d’en avoir extrait ce corps graisseux. À cet effet, on vide soigneusement avec un instrument de bois les os qui en contiennent avant de passer la pièce au saleur.