Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, III.djvu/122

Cette page n’a pas encore été corrigée

Le plus redoutable ennemi qu’on ait à craindre quand on conserve longtemps les laines en magasin, est l’insecte connu sous le nom de teigne des draps (Tinea sarcitella, Fab.), qui est un petit papillon d’un gris argenté avec un point blanc de chaque côté du thorax. C’est sous forme de larve ou chenille que la teigne fait ses ravages en dévorant la laine et en se formant un fourreau de soie ayant le plus souvent la forme d’un fuseau. Ses excrements ont la couleur de la laine qu’elle a rongée. Ces insectes voltigent depuis le commencement d’avril jusqu’en octobre, et déposent sur la laine de petits œufs qui éclosent en octobre, novembre ou décembre, suivant la température. Les chenilles restent engourdies pendant l’hiver, mais au prin- temps elles grossissent et mettent une grande activ- ité à dévorer la laine et à former leurs fourreaux qui ont 4 à 5 lignes de longueur. Lorsqu’elles ont pris tout leur accroissement, elles quittent la laine, se retirent dans les coins du magasin, se suspendent au plancher pour se transformer en chrysalide. Au bout de 3 semaines environ, elles percent leur envel- oppe et sortent sous la figure d’un papillon. Il est difficile de se garantir entièrement des dom- mages causés par les teignes ; mais on peut les éviter en partie. Faites enduire en blanc, dit dauBenTon, les murs et plafonner le plancher du magasin, afin de mieux apercevoir les papillons qui s’y reposent. Placez les laines sur des claies soutenues à 1 pied du carrelage, puis, avec un bâton terminé à son extrémité par un bouton rembourré, frappez sur les laines pour en faire sortir les teignes qui s’envolent et vont se poser sur les murs ou le plafond où il est facile de les tuer, en appliquant sur elles l’extrémité du bâton rembourré. Un enfant suffit pendant les 3 mois de la ponte pour soigner un magasin. On a aussi conseillé de placer dans les magasins de laines en suint quelques mauvaises toisons de laine lavées sur lesquelles les teignes feront leur ponte de préférence. On brûle ensuite ces toisons avant que les chenilles subissent leur métamor- phose. L’odeur du camphre et de l’essence de térében- thine ou de quelques autres substances d’une odeur très pénétrante, paraissent éloigner ces insectes, mais ne préservent pas entièrement de leurs ravages. Les vapeurs sulfureuses très concentrées les font périr ; mais ce procédé n’est pas praticable dans un grand magasin, et, d’ailleurs, il fait contracter aux laines une odeur fort désagréable. On pourrait, comme les drapiers, conserver les laines dans des sacs d’une toile à tissu très serré, ou dans des caisses calfeutrées avec soin, etc. ; ces moyens sont dispendieux et n’of- frent pas une entière sécurité, et il vaut mieux bat- tre les laines dans les magasins et tuer les papillons. En Allemagne on emploie avec succès des fumiga- tions ammoniacales que les teignes paraissent red- outer beaucoup, et quand la laine est empaquetée on couvre les sacs d’une certaine quantité de tiges d’absinthe ou de mélilot en fleur. seCTion v. — Vente et emballage des laines. La manière dont les laines sont livrées au com- merce varie suivant les pays. Par exemple, les laines communes et lavées de la Beauce, de la Picardie, de la Sologne, et les pelures, sont vendues en las et sans emballage ; au contraire, les laines fines indigènes, celles des métis, des mérinos, les écouailles, sont emballées dans des sacs de toile pour les préserver de tout accident et les expédier au loin. Pour emballer la laine en toison, on prend un sac formé de grosse toile à emballage, et on le sus- pend entre deux poteaux, en maintenant la partie supérieure ouverte avec un cerceau. Un homme descend dans ce sac, et on lui passe les toisons empaquetées séparément, qu’il place également et uniformément dans toutes les parties du sac, en les foulant d’une manière uniforme à la circonférence avec un de ses pieds, tandis que son autre jambe reste fixe au milieu du sac, afin de ne laisser ni de vides ni de poches où l’eau, pendant le transport, pourrait pénétrer et séjourner. Le sac, à l’extérieur, doit avoir, après l’emballage, une forme aussi ronde que possible ; mais il ne faut cependant pas fouler trop la laine, parce qu’on éprouverait ensuite trop de difficultés, surtout au bout de quelques mois, pour la diviser, l’assortir et la trier, et qu’en outre dans certaines races, telles que celles Infantado et Negretti, la matière grasse se durcit et colle ensem- ble les brins des toisons En général, les laines en toison ou simplement lavées, et qui ne sont pas destinées à être trans- portées au loin, sont peu foulées à l’emballage ; on doit au contraire presser davantage et donner plus de fermeté aux ballots de laine dégraissée qui doivent éprouver un transport lointain. L’emballage des laines lavées se fait de la même maniéré que celui des toisons, en les transportant dans le sac par poignées ou brassées, qu’on foule à mesure qu’elles sont introduites. En Espagne, la laine étant séchée est étendue sur une claie ou espèce de grillage de bois bien uni, par petites portions, pour que les trieurs la repassent. Lorsque ce repassage est terminé, on la porte à la balance, et on la pose ensuite sur l’estrive. On donne ce nom à 4 grosses cordes où sont suspendues les toiles des balles. Un homme entre dans la balle et un autre lui passe la laine qu’il foule bien avec les pieds.

CHAP.6e CONSERVATION DES LAINES 109 Les sacs ou balles se font avec de la toile de Picar- die. En Allemagne, surtout pour les laines super- fines transportées à l’étranger, on fait le sac double pour mieux les garantir, ou bien le sac est en coutil et enveloppé d’une autre toile commune. Le poids des balles varie avec les pays. Les laines communes de la Beauce, de la Picardie, etc., sont en balles cordées de 100 à 150 kilog. ; les laines fines indigènes du Roussillon, du Berry et de la Provence, en balles et ballots de 50 à 100 kil. ; les laines mérinos, en balles rondes et longues de 100 à 120 kilogrammes, etc. Quand les balles sont remplies, on en coud l’ou- verture,