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chap. 3e
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DE LA BETTERAVE.


plus de gelées à craindre, dans un bon sol mais non récemment fumé ; on les plante à 3 pieds de distance en tout sens, en ne laissant sortir de terre que le collet. Il est bon, lorsque les tiges commencent à se ramifier, de placer quelques échalas ou rames autour des plantes et de les y attacher. La graine se récolte en septembre, à mesure quelle mûrit ; on ne doit prendre que la meilleure et celle qui est très-mûre, et rejeter ou laisser sur le pied toute celle qui offre de l’incertitude dans ses qualités. Chaque pied de betterave peut fournir depuis 5 jusqu’à 10 onces de semence. On peut battre la graine au fléau, mais elle est alors moins pure ; en tout cas, après l’avoir battue, il faut la faire sécher au soleil sur des toiles, ou dans une touraille avec un feu très-doux. — Elle conserve sa faculté germinative pendant 4 à 5 années. — Lorsqu’on veut avoir des semences de diverses variétés, il faut avoir soin d’en éloigner les porte-graines ; autrement les poussières fécondantes se mêleraient et les variétés cesseraient d’être pures.

L’époque la plus convenable pour le semis de la betterave est celle où la terre, déjà échauffée par le soleil et parfaitement meuble, renferme encore assez d’humidité pour favoriser la germination et hâter le développement de la plante, et où les gelées printanières seront peu à craindre quand les premières feuilles sortiront de terre. La dernière moitié d’avril et la première de mai, pour le nord et le centre de la France, réunissent ces conditions. On conçoit que, dans le midi, celte époque doit être avancée, et d’autant plus que l’on redoute davantage les sécheresses de l’été. — Toutes les fois que la terre est saine et en état, et la température favorable, il y a même avantage, dans le nord et le centre de la France, à semer plus tôt, c’est-à-dire dans la première quinzaine d’avril ; ce temps à gagner n’est pas à dédaigner lorsqu’on a de grands semis à faire ; il est encore plus important sous le rapport de la précocité de la récolte. Au surplus, lorsqu’on sème trop tôt, les betteraves lèvent le plus souvent mal et inégalement, parce que le sol n’est pas assez échauffé, et, en outre, on les met aux prises avec une multitude d’herbes parasites qui les étouffent ou rendent les sarclages plus difficiles et plus dispendieux. — Lorsqu’on sème tard, ce qui réussit bien néanmoins quelquefois, on risque de voir la sécheresse et les chaleurs empêcher le premier développement ou diminuer la végétation des plantes, et on recule nécessairement l’époque de la récolte. Nous ignorons dans quelles circonstances et d’après quelles expériences M C. Tollard conseille de semer le plus tard possible, c’est-à-dire à l’époque la plus rapprochée de la dernière quinzaine de juin.

La graine de betterave étant assez longtemps à germer, pour en hâter la levée, certains cultivateurs la mettent tremper pendant plusieurs jours dans de l’eau ou du purin ; on obtient ainsi une avance importante, mais on risque quelquefois, si la saison est défavorable, de perdre la semaille.

Le semis a lieu : 1° à la volée, comme pour les céréales, ce qui exige de 10 à 12 kilog. de graine par hectare : cette méthode réunit tant d’inconvéniens et si peu d’avantages, qu’elle est généralement abandonnée dans toutes les bonnes cultures.

En rayons ou lignes, méthode qui exige au plus de 5 à 6 kilog. de graine. Dans ce cas, on trace sur le sol bien préparé, à l’aide d’un rayonneur pourvu de socs distans les uns des autres de 1 pied et demi à 2 pieds et demi, de petits sillons parfaitement droits et parallèles entre eux, quii doivent avoir environ 2 pouces de profondeur ; des femmes suivent l’instrument et déposent les graines dans les rayons au nombre de 3 ou 4 par chaque pied de longueur dans la ligne ; chacune d’elles peut en répandre de la sorte environ 7,000 par jour. — Dans la petite culture, où tous les binages devront avoir lieu à la main, 18 pouces entre les lignes, et même de 12 à 15 dans les terres maigres, suffisent, et on peut mettre les 3 ou 4 graines par touffes, à chaque longueur de 9 à 15 pouces, ce qui offre l’avantage de garnir le champ d’une manière plus égale.

L’emploi d’un semoir pourvu de pieds rayonneurs et suivi d’une chaîne, d’un râteau ou rouleau, comme il en existe plusieurs, notamment celui de M. Hugues (Tome I, page 214), serait encore plus convenable et plus économique pour celte opération. Dans l’usage de toute espèce de semoir, la graine de betterave coulant très-difficilement à cause de sa légèreté et de ses aspérités, il est essentiel de n’employer que de la semence préalablement nettoyée et exemple de tout corps étranger.

C’est pour remédier à cet inconvénient que M. Chartier a fait connaître tout récemment qu’il pile les graines dans une sébile de bois, puis les crible et pile de nouveau jusqu’à ce qu’elles soient débarrassées des aspérités, et qu’on n’en trouve plus que très-peu adhérentes les unes aux autres ; 1 livre de graine ainsi nettoyée perd environ 1/3 de son poids. Par cette méthode on évite le dépôt et la germination de 3 ou 4 graines à la même place, et conséquemment la nécessité de faire enlever à la main les plants surabondans, opération coûteuse, minutieuse et qui n’est pas sans inconvéniens : en plaçant les rayons à une distance de 2 pieds, et la graine à 10 ou 11 pouces sur les lignes, le kilog. contenant de 40 à 50 mille graines, il faudrait, par la méthode ordinaire, environ 3 kilog. par hectare, tandis qu’après les avoir pilées, 2 suffisent ; il y a donc ainsi économie de main-d’œuvre et de graines. Par là on facilite aussi beaucoup l’emploi des semoirs.

C’est à cause du même inconvénient que M. de Dombasle recommande particulièrement pour la semaille des betteraves, le semoir à brosses et à brouette, avec lequel on n’a pas à craindre les interruptions dans la chute de la graine, dont il est difficile de s’apercevoir dans les grands semoirs, et qui ont l’inconvénient de laisser des lignes entières non semées. La brosse ne doit être serrée que très-légèrement.

Lorsqu’on n’a ni rayonneur, ni semoir, on peut, comme dans le Palatinat, mettre à la suite de la charrue 2 personnes, dont l’une pratique avec la main, ou avec un bâton, un