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liv. iii.
ANIMAUX DOMESTIQUES : DES PRINCIPALES RACES DE CHEVAUX.


quée, tantôt des chevaux à tête camuse, dans certains temps des balzanes et à d’autres époques des robes sans tache. Le hasard, l’ignorance ont contribué a mêler des races qui auraient du rester distinctes ; l’administration des haras a pendant longtemps placé des chevaux de toutes figures et de toutes races dans les mêmes dépôts : il est résulté de toutes ces causes réunies, non-seulement que nos races de chevaux sont nombreuses, plus nombreuses mème que cela n’est à désirer, mais encore que beaucoup de nos chevaux n’ont pas de race, dans ce sens qu’ils proviennent de mélanges faits sans suite et sans but.

Or, si dans un pareil état des races de chevaux on voulait les décrire toutes avec les mêmes détails, nul doute qu’on ne se proposât un travail de peu d’utilité, et qu’en définitive, toutes les parties du tableau étant pour ainsi dire mises sur le même plan, il n’en devint confus et décoloré. Le mieux est donc de ne s’attacher qu’à la description des races les plus importantes, et de voir en second lieu les modifications moins essentielles qu’elles peuvent présenter.

L’auteur qui a vu de plus haut le sujet que nous traitons est M. le duc de Guiche, dans son ouvrage sur l'amélioration des chevaux en France. Il rapporte toutes les variétés de l'espèce à deux grandes catégories. La première comprend les chevaux légers, et aurait pour type le cheval anglais de pur sang; la seconde, les chevaux communs dont le portrait le plus pur se retrouverait dans le cheval boulonnais.

La distinction des chevaux communs, des animaux de la même espèce, que l'on appelle fins, nobles ou légers, et que, par un abus de mots, on désigne à l'exclusion des autres, sous la dénomination de chevaux de race, est bonne; et elle est même si naturelle qu'elle est admise sans calcul par beaucoup de personnes. Elle frappe plus ou moins selon que l'on pénètre plus loin dans l'organisation des animaux ou qu'on les examine plus superficiellement.

Le type anglais de pur sang et le type boulonnais sont bien choisis pour faire ressortir les différences qui existent entre les chevaux communs; mais il nous paraît difficile de ne pas admettre des types secondaires dans chacune de ces catégories. Ce qui paraît davantage, à la première vue, dans les portraits du type boulonnais (fig. 238) et du type anglais de pur sang (fig. 239), ce sont les caractères de force et de pesanteur du premier, et de légèreté du second. L’un est large et court, l’autre est mince et long. La croupe du cheval commun est courte, elle est fort oblique, elle descend, et comme on le dit en terme d’hippiatrique, elle est avalée; les reins et le dos sont courts, et l’épaule, qui n’a pas la longueur de celle du cheval fin, se rapproche davantage de la ligne verticale. Une conformation opposée se remarque dans le cheval fin.

Situés au pourtour des os, les muscles, puissances actives de la locomotion, concourent à établir les différences relatées. Ils sont courts et fort épais dans les races communes; on les voit souvent former sur la croupe de la race boulonnaise deux masses arrondies séparées par une dépression qui se continue sur les reins; la croupe, les reins sont plus charnus, le garrot est bien moins sec et moins élevé, l’encolure est bien plus volumineuse. Si l’on passe a l’examen des tissus, on s’aperçoit facilement dans le cheval commun de l’épaisseur de la peau, de l’abondance, de la longueur, et du peu d’élasticité des poils et des crins, du développement et de la mollesse des parties cornées, des châtaignes et des sabots.

Quand on dissèque comparativement ces animaux, on reconnaît que les os des animaux communs, plus volumineux, donnant de plus larges implantations aux muscles, sont aussi plus poreux et plus légers; que leurs muscles, offrant dans leur composition plus de tissu cellulaire et moins de fibres musculaires, sont flasques, et qu’ils doivent être moins énergiques. Nous remarquerons que leur peu de rigidité se trahit même sous la peau, toutes les fois qu’ils sont gros, épais, et qu’ils ne sont pas maintenus par des aponévroses, sortes d’enveloppes résistantes qui existent, par exemple, aux avant-bras et aux jambes; car au-dessus de l’avant—bras, près du coude et vers le poitrail, on voit dans les chevaux communs les muscles devenir pendants par l’effet de leur peu de fermeté. Les os, les muscles, la peau et ses annexes offrent des caractères opposés dans les chevaux anglais de pur sang. Les autres parties de leur organisation expliquent la grande vitalité dont ils jouissent. Le cœur, le cerveau, les poumons ont un développement remarquable: l’œil est plus ouvert et plus vif; enfin, la légèreté de la tête, la largeur du crâne contribuent encore à leur donner un air d’intelligence que l’expérience ne dément pas.