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aurait eu, ainsi que l’expérience l’a prouvé, de faire saillir les mères par les fils, parce que ceux-ci étaient des métis et par conséquent dénués de constance.

[7.2.9]

§ IX. — Qualités individuelles des animaux reproducteurs.

Soit que l’on croise ou qu’on améliore d’une autre manière les animaux domestiques, il ne suffit pas de considérer la race des sujets reproducteurs, il faut encore voir leurs qualités individuelles. Il existe sous ce rapport de très-grandes différences entre les animaux d’une même race, et c’est souvent pour n’y avoir pas attaché assez d’importance qu’on a obtenu de mauvais résultats de croisemens, du reste bien entendus. On est trop disposé à oublier toute l’influence qu’exercent les circonstances artificielles sur les caractères et les qualités d’une race et même des individus isolés, et jusqu’à quel point ces circonstances peuvent les modifier.

Parmi les défauts de plusieurs races perfectionnées, on remarque une faiblesse et une délicatesse de complexion qui viennent évidemment de soins trop grands et d’une nourriture trop recherchée. Malheureusement, ce défaut est héréditaire et paraît se transmettre surtout du père aux produits. Lorsque ces derniers sont privés des soins et des alimens substantiels qu’on prodiguait aux parens, et sont traités a l’instar de la race commune, ils succombent ou deviennent chétifs et misérables.

C’est surtout dans la production de l’espèce chevaline, pour laquelle une constitution robuste est une qualité essentielle, que ces faits ont été observés et ont été le plus préjudiciables, et c’est à cette circonstance qu’on doit attribuer en partie le peu de résultats qu’a eus jusqu’à présent l’institution des haras en France, institution qui, dirigée dans un autre sens, aurait pu être d’une haute utilité.

Pour qu’une race puisse être employée avec avantage comme type améliorateur, il faut que les qualités qui la distinguent ne soient pas le résultat de circonstances exceptionnelles, et puissent persévérer sous l’influence du régime, des soins et du genre de service que la grande majorité des éleveurs peut lui appliquer.

Il est inutile d’ajouter qu’une des premières conditions que l’on doit rechercher dans les animaux reproducteurs, c’est une bonne santé ; et que pour obtenir de beaux produits d’un mâle, on ne doit lui donner qu’un petit nombre de femelles à saillir.

[7.2.10]

§ X. — De l’âge le plus convenable à la reproduction.

L’âge le plus convenable pour la propagation est depuis l’époque où le désir d’accouplemeni commence à se manifester fortement et d’une manière réitérée, jusqu’à celle où il faiblit. C’est la période où l’animal est dans toute sa force.

La plupart des animaux manifestent de très-bonne heure le désir de génération, souvent lorsqu’ils ont à peine acquis la moitié de leur développement. En laissant des individus de cet âge s’accoupler ensemble, on se nuirait non-seulement par la petitesse des produits qu’on en obtiendrait, mais encore en arrêtant la croissance des parens. Toutefois, si l’on voulait attendre, pour les accoupler, qu’ils aient acquis toute leur taille, on risquerait de dépasser l’époque la plus propice pour la reproduction, surtout chez les mâles qui, ordinairement, deviennent lourds et paresseux dès qu’ils cessent de croître. Il est vrai que les premières produits de jeunes bêtes sont un peu moins gros à leur naissance que ceux de bêtes adultes, mais ils récupèrent cela plus tard, et ils atteignent la même taille que les autres individus de la race. La plupart des animaux domestiques peuvent s’accoupler lorsqu’ils ont environ les trois quarts ou même seulement les deux tiers de leur taille. D’un autre côté, les vieilles bêtes, lorsqu’elles produisent encore, ne créent ordinairement que des sujets faibles et chétifs. D’ailleurs, les vieux mâles ne peuvent guère saillir qu’à de longs intervalles ; et les vieilles femelles, lors même qu’elles manifestent de la chaleur, ne retiennent et ne conçoivent que rarement.

On observe que les petites races sont en général plus précoces sous ce rapport comme sous les autres, et cessent aussi plus tôt que les grandes.

Mais quel que soit, du reste, l’âge des individus, ce qu’il faut considérer particulièrement lorsqu’on veut les employer à la propagation (à part les circonstances spéciales à notre but), c’est leur vigueur, leur énergie et la force avec laquelle ils manifestent leurs désirs.

[7.2.11]

§ XI. — Des règles à observer dans l’accouplement.

Les animaux domestiques entrent en chaleur à certaines époques de l’année plutôt qu’à d’autres. On peut changer cette époque presque à volonté, et on l’a déjà fait pour la plupart des genres de bestiaux, suivant les besoins de la culture.

La nourriture influe beaucoup sur le moment où l’animal entrera en chaleur. Cette dernière se manifeste ordinairement à l’époque où la nourriture devient meilleure, c’est-à-dire au printemps, avec la nourriture au pâturage. L’éleveur, en améliorant le régime alimentaire à certaines époques, peut déjà influer sur cet objet, et notamment hâter l’époque de la chaleur ; il peut également la retarder, en ne satisfaisant pas les premières manifestations. Toutefois, ce n’est pas sans précautions qu’il faut employer ce moyen, parce que la femelle ne conçoit pas aussi sûrement, et souvent ne conçoit plus du tout lorsque plusieurs chaleurs sont restées non satisfaites.

On a observé, du reste, que les bêtes trop grasses, de même que les bêtes maigres et débiles, soit mâles, soit femelles, procréaient moins sûrement que celles qui sont en bon état de chair et de vigueur. Les femelles, notamment, ne retiennent presque jamais dans cet état.